J.-L.-C. Choisy

De même qu’avec l’art pauvre et le op art la vie de la rue pénètre dans les salles silencieuses et sacrées des musées, de même, avec l’apparition du fonctionnalisme des années 20 à 30, l’architecture cessa d’être un art de chevalet, un art en marge de la vie qui puisait ses motifs dans le passé. Si aujourd’hui le fonctionnalisme, au sens des années héroïques a disparu, l’architecture vivante ne reviendra cependant plus jamais à l’éclectisme historisant que nous avons connu. C’est l’immense service que les pionniers ont rendu aux générations montantes et dont les derniers deux représentants Mies van der Rohe et Le Corbusier viennent de s’éteindre.

Si l’un est resté fidèle à sa jeunesse tout en épurant sa pensée et ses formes jusqu’à atteindre une sorte de classicisme, l’autre, c’est-à-dire Le Corbusier, tout comme Picasso, a suivi une évolution constante.

Tout comme ceux qui pratiquent le surf, il s’est laissé porter par la vague du temps et c’est lui le premier qui a abandonné l’apparente impersonnalité du fonctionnalisme en cherchant des expressions beaucoup plus personnelles. Si tous les deux doivent être considérés comme des maîtres, Le Corbusier plus particulièrement a mis en vogue la notion de l’architecte inspiré, du génie. Tout comme il y a eu les poètes maudits a pris racine la notion de l’architecte génial et, dès lors, l’ambition de nombreux architectes fut d’être comptés au nombre des génies; de ce fait, tout en utilisant une partie du bagage amené par les fonctionnalistes, ces architectes se sont appliqués à se faire remarquer, à laisser leur signature; et l’on voit de ce fait réapparaître une forme d’« architecture de chevalet», c’est-à-dire avant tout la recherche d’une expression personnelle, qui souvent s’écarte de plus en plus des sources vitales sur lesquelles doit s’élaborer la véritable architecture, celle qui doit être le reflet de la pensée et des besoins de son époque.

On peut parler d’un éclectisme moderne dont les formes sont empruntées tantôt à la mode, tantôt à la technique et dont on peut être certain qu’elles vieilliront mal.

A part ces édifices, avec toutes les gradations possibles depuis les réussites jusqu’aux clichés les plus vides de contenu, se réalisent journellement dans le monde entier ce qu’on peut appeler simplement des constructions ou réalisations. On ne 198

So wie mit der naiven Kunst und der Pop-art das Leben der Strasse in die stillen und geheiligten Hallen der Museen eindringt, so brachte auch das Aufkommen des Funktionalismus der Jahre 1920-1930 eine Architektur des Zeichenbretts zum Verschwinden, eine Kunst am Rande des Lebens, die ihre Motive aus der Vergangenheit schöpfte. Wenn heute der Funktionalismus im Sinne der heroischen Jahre verschwunden ist, so wird doch die lebendige Architektur nie mehr auf den historisierenden Eklektizismus zurückkommen, den wir erlebt haben. Darin besteht der einzigartige Dienst, den die Pioniere den heranwachsenden Generationen geleistet haben und deren letzte zwei Repräsentanten gerade eben von uns gegangen sind: Mies van der Rohe und Le Corbusier.

Wenn der eine seiner Jugend treu geblieben ist und nur sein Gedankengut und seine Formgebung verfeinert hat, so dass er eine Art Klassizismus erreichte, so hat der andere, das heisst Le Corbusier, genau wie Picasso eine anhaltende Entwicklung durchgemacht. Genau wie jemand, der «Surfing» treibt, hat er sich von den Strömungen der Zeit tragen lassen und als erster die offensichtliche Unpersönlichkeit des Funktionalismus aufgegeben, um nach viel persönlicheren Ausdrucksformen zu suchen. Wenn man beide als Meister ansehen muss, so hat besonders Le Corbusier den Begriff des inspirierten Architekten, des Genies, geschaffen. Wie es «verfluchte» Dichter gab, so kam der Begriff des genialen Architekten auf, und seither legen viele Architekten ihren Ehrgeiz darein, zu den Genies gezählt zu werden. Daher haben sich diese Architekten bemüht, unter teilweiser Benützung des Gedankengutes des Funktionalismus, Aufsehen zu erregen, ihre Handschrift zu hinterlassen. So sieht man wieder eine Art ZeichenbrettArchitektur auftauchen, das heisst vor allem die Suche nach persönlichem Ausdruck, der sich oft mehr und mehr von den vitalen Quellen entfernt,aus denen eine wahrhafte Architektur entstehen sollte nämlich Spiegelbild der Gedanken und Bedürfnisse ihrer Epoche zu sein. Man kann von einem modernen Eklektizismus sprechen, dessen Formen bald den Modeströmungen, bald der Technik entlehnt sind - eins ist sicher, sie werden schlecht altern. Abgesehen von diesen Gebäuden mit allen möglichen Abstufungen von

In the same way that with poor art and op art, the life of the streets penetrates the silent and sacred rooms of the museums, with the apparition of the functionalism of the twenties and thirties, architecture has ceased to be an easel art, an art on the margin of life which draws its motives from the past. If today functionalism, in the sense of the heroic years, has disappeared, living architecture will never again return to the historic eclecticism that we have known. It is the great service that the pioneers have rendered to the rising generations the last two representatives of which, Mies van der Rohe and Le Corbusier, have just died.

If one remained faithful to his youth while refining his thoughts and his forms until he attained a kind of classicism, the other, that is Le Corbusier, as Picasso followed a constant evolution.

Just like those who go surfing he let himself be carried on the waves of time and it was he who first abandoned the obvious impersonality of functionalism by seeking expressions that were much more personal. If both of them must be considered as masters, Le Corbusier in particular has made fashionable the idea of the inspired architect, of the genius.

Just as there are wretched poets, the idea has taken root of the inspired architect and from there the ambition of numerous architects was to be counted amongst the geniuses. Therefore, while using part of the trappings brought by the functionalists, these architects have tried to make themselves noticed by leaving their signature on their works. Because of this one sees a form of ‘easel architecture’ reappearing, which is above all the search for personal expression, which often moves further and further away from the vital sources on which a true architecture must be built up, that is the reflection of the thought and of the needs of its era.

One can talk of a modern eclecticism the forms of which are borrowed sometimes from fashion, sometimes from technology and of which one can be certain that they will age badly.

Apart from these buildings, with all the possible stages from the successes down to the stereotypes with the least contents, there is carried out daily throughout the world what can be called simply constructions or works. One does not consider them as belonging to architecture with a capital ‘A’.

les considère pas comme appartenant à l’architecture avec un grand A.

Tout comme dans l’histoire de l’art, on ne nous a parlé que de cathédrales et de palais, on n’a d’attention que pour le surprenant ou le nouveau. On oublie qu’une démocratie n’a pas de palais, mais que son expression devrait être celle du milieu dans lequel la communauté vit, et non pas celle de quelques monuments.

Il faut malheureusement reconnaître que à cause des contigences économiques mais beaucoup plus à cause du manque de véritable culture, ces réalisations sont la plupart du temps sans intérêt. Construites sans amour, elles n’offrent qu’un cadre très médiocre aux individus qui les occupent. Beaucoup de gens imputent cet échec à la technique, rêvent de matériaux naturels et de méthodes artisanales.

Cette attitude est rétrograde et montre un refus d’accepter notre propre époque et sa technique qui est justement son élément de valeur. Notre existence journalière est entièrement dépendante de la technique, et l’on ne voit pas pourquoi cette même technique ne devrait pas nous permettre de nous créer un environnement valable.

Pour arriver à ce résultat qui me semble la seule voie possible, il faut apprendre tout d’abord à vivre avec son époque, en comprendre les erreurs et les valeurs.

Seulement à partir de cet état d’harmonie peuvent s’élaborer des formes conçues pour être utilisées par l'homme d’aujourd’hui, tout comme les objets et ustensiles dont la technique nous a dotés et dont nous ne saurions plus nous séparer.

C’est en se basant sur la compréhension de nos possibilités que nous pourrons développer une nouvelle culture qui trouvera ses propres formes. Au lieu de subir passivement les formes imposées brutalement par la technique industrielle, on verrait naître un monde harmonieux dans lequel la technique offre des moyens et la culture la manière de les utiliser.

En d’autres mots, au moment où beaucoup désespèrent et se révoltent contre ce qui représente la plus formidable accélération de la maîtrise humaine sur la matière, nous proposons une tentative de compréhension de ces moyens pour les adapter à l’usage de l’homme et, de ce fait, accéder à la véritable maîtrise, celle qui pourrait engendrer une sorte de nouvel humanisme.

J.-L.-C. C.

geglückten Beispielen und völlig inhaltslosen Klischees, entsteht täglich in der ganzen Welt das, was man nur einfach Konstruktionen oder Realisationen nennen kann. Zur Architektur mit einem grossen A können sie nicht gezählt werden.

Wie man in der Kunstgeschichte nur von Kathedralen und Palästen spricht, so beachtet man auch jetzt nur das Überraschende und Neuartige. Man vergisst, dass es in der Demokratie keine Paläste mehr gibt, sondern dass ihr Ausdruck in der Umwelt der Gemeinschaft liegen sollte und nicht in der einiger Monumente. Man muss leider feststellen, dass, aufgrund wirtschaftlicher Einschränkungen, aber vor allem aus einem Mangel an wahrer Kultur, diese Bauten meistenteils uninteressant sind. Ohne Liebe gebaut, bilden sie nur einen mittelmässigen Rahmen für das darin lebende Individuum. Viele schieben diesen Misserfolg der Technik zu, träumen von natürlichen Materialien und handwerklichen Verfahren. Diese Haltung ist rückläufig und die Weigerung, unsere eigene Epoche und ihre Technik anzunehmen, die gerade ihr bester Teil ist. Unser tägliches Leben ist vollkommen von der Technik abhängig, und man sieht nicht ein, warum diese gleiche Technik uns nicht erlauben sollte, eine gültige Umwelt zu schaffen.

Um zu diesem Ergebnis zu gelangen, das mir als das einzig mögliche erscheint, muss man zuerst lernen, mit seiner Epoche zu leben, ihre Fehler und Werte zu verstehen. Nur von diesem harmonischen Zustand ausgehend, können sich Formen entwickeln, die vom heutigen Menschen benutzt werden können, genau wie Objekte und Gegenstände, die uns die Technik beschert und die wir nicht mehr entbehren könnten.

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J.-L.-C. Choisy

Wenn wir uns auf das Verständnis unserer Möglichkeiten stützen, können wir eine neue Kultur entwickeln, die ihre eigenen Formen finden wird. Anstatt passiv die von der industriellen Technik brutal auferlegten Formen zu erdulden, wird eine harmonische Welt entstehen, in der uns die Technik die Mittel anbietet und die Kultur ihre Anwendungsweise.

Anders ausgedrückt, in einem Augenblick, wo viele verzweifeln und sich gegen das auflehnen, was den grossartigsten Fortschritt der menschlichen Herrschaft über die Materie darstellt, schlagen wir den Versuch vor, diese Mittel zu verstehen und für den Gebrauch des Menschen anzupassen. Nur so kann man zur wahren Beherrschung der Materie gelangen, die eine Art neuen Humanismus hervorbringen könnte.

J.-L.-C. C.

Just as in the history of art we have only heard of cathedrals and palaces, one only has eyes for the surprising or the new.

One forgets that a democracy has no palace, but that its expression must be that of the milieu in which the community lives, and not that of several monuments.

Unfortunately, it is necessary to recognize the fact that because of economic contingencies but more often still because of a lack of true culture these realizations are for the most part without interest. Built without love they offer only a very mediocre setting for the individuals who occupy them. Many people ascribe this setback to technology, dreaming of natural materials and craft methods.

This is a backward attitude and shows a refusal to accept our era and its technology which is precisely its valuable element. Our daily existence is entirely dependent on technology and one does not see why this same technology should not allow us to create a sound environment.

To reach this result, which seems to me the only possible way, it is necessary first of all to learn to live with the times, in comprehension of the errors and the values. It is only on the basis of this state of harmony that the forms conceived for the use of humanity today can be elaborated just as for the objects and utensils with which technology has endowed us and which we no longer know how to do without.

It is in basing ourselves on the comprehension of our possibilities that we could develop a new culture which will find its true forms. Instead of submitting passively to the forms brutally imposed by the industrial technology one would see born a harmonious world in which technology offers the means and culture the way in which to use them.

In other words, at the moment when many despair and revolt against what represents the most formidable acceleration in human mastery over matter, we propose an attempt at the comprehension of these means in order to adapt them to the use of man and by this means to gain a true mastery, which could engender a kind of new humanism.