Code des droits et devoirs des architectes
Dès sa création, l’Union internationale des architectes s’est préoccupée de l’évolution qu’avaient subie au cours de ces cinquante dernières années les rapports des architectes avec l’Etat. On se rappelle qu’un des thèmes du Congrès de Lausanne en 1948 était déjà: « L’architecte, l’Etat et la société ». Par la suite, la Commission de la position sociale de l’architecte, nommée pour étudier les divers aspects de cette question, constata le besoin de préciser dans une charte les principes qui doivent diriger les architectes dans leurs rapports entre eux, avec leurs clients, avec la société. Mais l’entreprise au début parut téméraire, les conditions dans lesquelles les architectes exercent leur profession étant extrêmement diverses. Que l’on songe d’une part à la Russie soviétique et d’autre part à l’Amérique du Sud et aux Etats-Unis! En dépit de ces différences, il apparut cependant possible de rédiger des règles assez générales pour être valables partout, assez fermes cependant pour que le code qu’elles constituent puisse être considéré par tous les architectes comme une base désormais unique de morale professionnelle et pour que les gouvernements comme les institutions des Nations Unies soient en présence d’un document où l’architecte se définit lui-même de façon parfaitement cohérente.
Elaboré par la commission, soumis à toutes les sections nationales, le « Code des droits et devoirs de l’architecte » fut définitivement adopté par l’assemblée de l’U.I. A.en juillet 1955, à La Haye. Il comprend, après un bref préambule exposant à quels besoins ce document répond, une série de définitions traitant de la position de l’architecte vis-à-vis de la société suivies des douze articles du code lui-même. Fortement inspiré du « Code Guadet » adopté par les architectes français en 1896 mais tout à la fois plus large et plus actuel, le Code de l’U.I.A. doit, dans le monde entier, aider les architectes à conquérir et à défendre la position sociale qui correspond à l’importance de leur mission.
SECTION SUISSE DE L’U.I.A.
Préambule
L’exercice de la profession d’architecte peut, suivant les cas, revêtir différents caractères: Certains d’entre eux exercent une profession libérale.
Certains autres sont plus ou moins liés à l’Etat, à des administrations publiques ou à des Instituts.
D’autres, enfin, réalisent eux-mêmes les œuvres dont ils sont les auteurs.
Cependant, il est à la fois possible et nécessaire de définir des règles qui soient valables pour tous.
Ainsi l’U.I.A. entend manifester l’unité mondiale des architectes sur le statut qu’ils préconisent pour pouvoir accomplir leur mission dans sa plénitude.
Position sociale de l’architecte
L’architecte est celui qui, maître en l’art de bâtir selon les meilleures conditions de la vie, crée et anime les lieux dans lesquels passe ou séjourne l’homme.
Pour exprimer les aspirations et satisfaire les besoins de son époque, il doit avoir connaissance et compréhension du milieu humain dans la plus large acception du terme, et témoigner d’un respect constant des réalités économiques et de tous les facteurs qui ont une incidence sur le milieu. Il conçoit son œuvre dans le cadre d’un plan d’ensemble dont il doit être, à tous les échelons, l’animateur et l’ordonnateur.
A cet égard, l’architecture et l’urbanisme sont des disciplines complémentaires.
L’architecte s’efforce de développer constamment sa compétence technique et ses capacités artistiques, ainsi que ses qualités morales.
Il est nécessaire que la société, reconnaissant le caractère fondamental de la mission de l’architecte, lui accorde en retour la protection légale que sa profession requiert pour s’exercer normalement.
Ceci peut être obtenu soit par l’amélioration des lois existantes, soit par la promulgation de lois nouvelles inspirées par un idéal professionnel élevé conforme au but poursuivi par l’U.I.A.
Ces lois doivent avoir pour but d’édicter ou de définir notamment: la qualification de l’architecte; les moyens les plus propres à assurer d’une manière effective sa formation et à empêcher l’accès à la profession de toute personne non qualifiée; les règles de conduite relatives à l’exercice de la profession pour lui assurer un niveau moral élevé; les sanctions que ces règles comportent.
Indépendamment des dispositions légales, il est nécessaire que les organisations nationales d’architectes édictent les règles susceptibles de promouvoir l’esprit de confraternité, et qu’elles imposent à leurs membres un code de morale professionnelle ayant pour base les principes ci-après qui en constituent le cadre le plus large, laissant à l’organisation nationale la latitude de l’interpréter restrictivement si elle le juge nécessaire pour son usage.
Quelle que soit la forme de son activité, l’architecte reste toujours conscient du caractère essentiel de sa mission. Ainsi, par son œuvre, il contribue à l’épanouissement de l’homme.
Droits et devoirs de l’architecte
L’architecte apporte à son client le concours de tout son savoir, de son expérience et de son dévouement dans l’étude de ses projets, dans la direction de ses travaux et dans les avis ou conseils qu’il est appelé à lui donner.
Il sert les intérêts de son client dans la mesure où ils ne s’opposent pas à ce qu’il estime conforme à son devoir ou à l’intérêt de la collectivité.
Le développement de son activité devant reposer sur sa seule valeur, il s’interdit toute publicité; il doit, en toutes circonstances, être et rester libre de tout esprit mercantile.
Il s’interdit toutes démarches ou tous autres moyens susceptibles de léser directement ou indirectement un confrère. Il s’efforce de rester objectif et courtois dans la critique des œuvres de ses confrères et il accepte dans le même esprit la critique faite aux siennes.
Il s’interdit non seulement le plagiat, mais aussi toute action incompatible avec les règles que la conscience impose aux artistes dignes de ce nom dans leurs rapports mutuels.
Quand il emploie de jeunes confrères ou qu’il en dirige le travail, il les fait profiter de son expérience et les aide dans leurs efforts pour parvenir à acquérir la position correspondant à leur capacité, aussi bien personnellement que dans le cadre de l’organisation professionnelle.
Il exercé pleinement son droit d’auteur sur ses œuvres selon les conventions universelles et selon les dispositions légales et coutumières de chaque pays.
Par la discipline de sa formation professionnelle, il est qualifié pour diriger et coordonner tous les corps d’état, y compris ceux qui relèvent de l’industrialisation de la construction et de l’équipement.
Quand il fait appel à la collaboration d’artistes, d’ingénieurs ou de tous autres spécialistes, il définit préalablement les droits, les devoirs et les responsabilités de chacun.
Il use de son autorité morale pour susciter la bonne harmonie entre tous ceux qui participent
à la réalisation de son œuvre et s’emploie à leur en faire saisir le but et l’esprit dans lequel il l’a conçue.
Il a droit à la juste et légitime rémunération des services qu’il rend — cette notion devant être étendue à la valeur de ses initiatives.
Il se fait rémunérer par des honoraires ou par un traitement à l’exclusion de toute commission ou avantage.
Dans le cas où il procède, en collaboration avec l’industrie, à l’élaboration ou à la mise au point de procédés nouveaux, il a également droit à rémunération suivant les modalités à déterminer par les organisations nationales.
Toute nouvelle forme d’exercice de la profession devra s’inspirer des principes de ce code.