L’architecte au sens profond du mot, l’architecte complet digne de ce nom, sait à nouveau que sa tâche ne s’arrête pas à l’édifice, dont il étudie normalement le détail jusqu’à l’ameublement de ses salles.

Il sait voir au-delà de son programme et considère sa construction comme un élément de la cité et de l’espace.

Il ne peut dissocier son volume des ensembles environnants dont il n’est souvent qu’un membre obscur ou effacé, parfois, au contraire, un membre déterminant ou dominant.

Cet important bâtiment administratif, situé entre la place de Milan et le lac, dans un magnifique cadre de verdure, devait, malgré son importance, laisser dans la mesure du possible la vue libre sur le lac aux visiteurs venant de la place de Milan. Des arbres centenaires situés sur ce terrain, le cadre grandiose ont posé des problèmes précis. Il fallait maintenir ces arbres en valeur et les relier à l’architecture par une disposition judicieuse des volumes et par une expression de légèreté des façades.

Le bâtiment est en forme d’équerre ouverte. Il est constitué d’un corps central formant entrée principale et d’un corps latéral avec entrée sur l’avenue des Bains, comprenant au sud l’entrée du garage.

L’entrée principale se trouvant à une distance assez grande de l’avenue, une marquise jaillissant audacieusement de la façade donne l’importance nécessaire à l’entrée. Pesant 3111 kg, cet auvent de plus de 10 m de saillie, dont près de 7 m en porte-à-faux sans aucun renforcement ou structure quelconque est constitué d’éléments d’alliage d’aluminium extrudé en forme de V et plié, dont l’épaisseur n’est que de 5 mm. Ces profils, mis bout à bout, représenteraient une longueur de 295 m. Pour monter le tout, il a fallu percer 26.880 trous et utiliser 6720 boulons ! Sous la marquise, un tambour d’entrée tout en glaces et aluminium donne une ambiance de clarté. Cette ambiance de clarté et de transparence se retrouve dans le grand hall de réception. Ses travées de 8 m assurent une visibilité parfaite sur tout le paysage se trouvant au sud du bâtiment.

Tout le dallage est en marbre suisse cristallina. Le plafond est constitué de losanges, soit bruts de décoffrage, soit revêtus de matériaux accoustiques. Les panneaux sont de couleur rouge. Le comptoir est recouvert de marbre noir, tandis que les escaliers sont de marbre serpentine massif sur poutre à curieuses arêtes de béton brut.

Coupés par une paroi de verre, les pelouses et les massifs de fleurs pénètrent sans autre transition dans le bâtiment. Un escalier de forme hélicoïdale, très léger, dessert les bureaux particuliers de direction. A l’ouest, l’autre escalier dont les parois sont revêtues de marbre gris-bleu est éclairé par le grand claustra, constitué d’éléments préfabriqués de béton blanc. Une entrée en glace, précédée à l’extérieur d’un large escalier de granit, donne accès au vestibule.

Dans l’étude de cet édifice, il était nécessaire de prévoir la libération totale des espaces intérieurs. Ce principe permettant, entre quelques murs et points porteurs indispensables, de disposer les cloisons amovibles pleines, transparentes ou translucides. Selon les besoins du moment, il est possible de modifier à sec le cloisonnement dans toutes les parties du bâtiment et composer ainsi de grands ou de petits bureaux.

Il était en outre nécessaire d’obtenir dans les grands bureaux des conditions de travail idéales. Il a donc été prévu une insonorisation maximum, une ventilation sans ouvertures de fenêtres et un équipement très poussé des installations techniques.

Le service économat et courrier est disposé à la rencontre des deux bâtiments. Il est relié à tous les services vitaux de l’organisation par les monte-dossiers à déversement automatique.

La structure du bâtiment consiste en une ossature de béton armé. L’inégalité de résistance des sols et la présence d’une grande quantité d’eau à faible profondeur ont amené les ingénieurs à concevoir un radier général sous le premier sous-sol. Les façades sont constituées par une résille de poteaux formant meneaux pare-soleil. Dans l’axe longitudinal du bâtiment, une seule rangée de poteaux cylindriques soutiennent des planchers de béton armé. Le contreventement de l’édifice a été obtenu par des voiles de béton armé en bout de bâtiment et par des voiles autour des cages d’ascenseurs. L’extrême légèreté des structures apparaît en façade avec le béton brut de décoffrage sans aucun revêtement ni peinture. Pour la façade nord, moins éclairée, une légère adjonction de ciment de couleur verte a permis d’éviter une trop grande brutalité de ton opposant la façade à grande verticale avec les pelouses et les cèdres. Les fenêtres sont toutes en allèges d’aluminium, les unes à guillotine, les autres pivotantes dont l’ouverture n’est prévue que pour le nettoyage des glaces. Les allèges n’étant que de 30 cm de hauteur, la visibilité reste parfaite.

Des stores extérieurs à lamelles renforcées assurent la protection contre le soleil. L’insonorisation a été réalisée par des plafonds en aluminium perforé et par des revêtements du sol en polyvinyl ou caoutchouc.

Ces plaques d’aluminium constituent le chauffage par rayonnement. Le complément de chauffage est assuré par la ventilation dont l’arrivée d’air abouti dans des appareils de pulsion sous les fenêtres. Des installations spéciales de conditionnement d’air sont établies dans les salles de conférences, conseils d’administration, et salles de machines à cartes perforées.

L’éclairage des couloirs, vestibules, escaliers, est assuré par des tubes au néon. Dans les bureaux, des appareils à tubes luminescents sont encastrés dans les plaques des plafonds. Au sous-sol se trouvent les locaux des installations techniques: la salle des tableaux (chauffage, ventilation, électricité, distribution d’eau), les salles de chauffage et ventilation. Ces installations sont extrêmement complexes; plus de 1100 fils de commande à distance, par exemple, aboutissent au seul tableau de ventilation.

Un jardin suspendu a été réalisé sur la terrasse du troisième étage du bâtiment de l’aile.

Une gamme sourde de jaunes, de gris et de mauves constitue le fond sur lequel jouent des couleurs plus vives (bleu, rouge, jaune ou noir) créant une ambiance harmonieuse dans les divers locaux. Le mobilier du hall, des salles et bureaux principaux a été étudié afin de constituer avec l’architecture du bâtiment un tout cohérent.

Etant donné l’importance de ce bâtiment, il nous est impossible d’entrer dans tous les détails de la construction. Néanmoins, nous aborderons dans les chapitres suivants différents problèmes particuliers.

Nous recommandons à nos lecteurs de s’y référer afin d’avoir une idée plus complète de tous les efforts réalisés.