De la possibilité de construire en matière plastique Gedanken zur Möglichkeit des Bauens in Kunststoff The possibilities of plastic as a structural material

Le projet d'un bâtiment d'exposition qui, dans le cas de l'Expo 64 à Lausanne, par exemple, n'est appelé à servir que pendant six mois, propose au réalisateur du plan une tâche de nature toute particulière qui, pour différentes raisons, est entreprise avec des sentiments mêlés. Il est tout d'abord clairement établi qu'un mode de construction conventionnel d’une commande spéciale ne saurait être envisagé; d'autre part, dans la recherche de la nouveauté, la tentation est grande de rechercher l’original à tout prix, par volonté d'originalité.

La justification de l’exécution d'une structure originale ne peut se trouver que si le chemin vers sa réalisation implique la recherche de méthodes fondamentalement nouvelles et l'utilisation de matériaux nouveaux. Alors l’oeuvre architecturale, par-delà sa brève durée d'utilisation, peut être considérée comme un objet expérimental chargé de sens, source d'indications et de connaissances pour les possibilités des constructions futures.

Telle est la pensée qui motiva la décision

d'utiliser l'occasion unique à des fins expérimentales et de projeter un bâtiment à grande surface comme construction de matière synthétique portante, bien que, ou justement parce que, au moment de cette décision, rien ne laissait présager si une tentative de ce genre réussirait et mûrirait des connaissances positives. La victoire remportée sur un chemin pierreux, souvent traversé de barricades apparemment infranchissables, permet de déclarer que l'essai a été plus que probant. Nous sommes effectivement au seuil de la construction en matière plastique utilisée comme matériau portant pour grandes portées! Du point de vue technique aussi bien qu'économique, ce pronostic peut être établi avec certitude aujourd'hui.

Quelles propriétés spécifiques de la matière synthétique déterminent la structure des bâtiments de l'avenir?

Les produits synthétiques, pour autant qu'ils puissent servir de matériau à l'ingénieur architecte, se distinguent par les qualités générales fondamentales suivantes.

Le haut degré de résistance à la traction des

matières synthétiques armées de fibres de verre, qui atteint dans l'ordre des grandeurs celle des alliages aluminium mou, joint au moindre module d'élasticité et au prix très élevé (ordre de grandeur d'un bon bourgogne) indique clairement que, pour de grandes portées, le remplacement ne peut s'effectuer économiquement que dans le cas de voile extrêmement mince, travaillant à traction, ceci afin d’éviter des problèmes de flambage. La voile suspendue à double courbure est, de ce fait, la forme idéale des constructions en matière synthétique de l’avenir. Mais la légèreté des couvertures de ce genre rend la construction très sensible aux effets statiques et dynamiques du vent.

C'est pourquoi il faudra mettre les constructions, afin de les préserver du flambage quelles que soient les charges, de tous côtés sous une prétension. Il se présente ici une certaine parenté avec le mode de construction d’une tente; pour ce motif justement il est important de faire les différences essentielles. Les matières synthétiques armées de fibre de verre présentent des avantages multiples sur la toile de tente.

Dans l’ensemble le prix de la matière synthétique, à solidité égale, est sensiblement moindre. On économise notammenttous les renforts de câbles. La fabrication de surfaces non développables ne pose aucun problème en matière plastique. La résistance des toiles de tente est anisotrope, c'est-à-dire qu'elle dépend de la direction des fils du tissu, au contraire de la matière synthétique à armature de verre. La rigidité à la flexion des toiles est quasi zéro tandis que la plaquede matière synthétique, malgré sa minceur, offre une résistance à la flexion, petite d’ailleurs, mais pourtant décisive souvent. On peut en outre déterminer à son gré la couleur et la transparence des constructions plastiques. C'est là que se cachent, sans doute aucun, les possibilités architectoniques les plus séduisantes. La lumière passe à travers la structure portante!

Les principes formulés ici pour l'utilisation rationnelle des matières synthétiques en tant que surfaces portantes, brièvement résumés d'après les observations faites lors des travaux de développement, ne sont pas encore parvenus à leur forme pure dans la 4

1

» Maquette de l'ensemble • Gesamtmodell ■ In model form

Â

2

Fabrication: pose de la fibre de verre sur le coffrage • Herstellung : Einlegen der Glasfaserarmierung auf die Schalung ■ Fabrication : Placing the glass fibres on the form-work 3 Système géométrique et statique de la structure • Statisches und geometrisches System derStruktur ■ Geometrie and static system of the structure

A

4 • Essai en laboratoire sur un modèle réduit au 1 : 6 • Modellversuch im Laboratorium im Massstab 1 : 6 ■ Experimental model in the Laboratory, scale 1 :6

151

152

halle projetée pour l'Expo 64. Quoi qu’il en soit, s'assemble l'image en forme de corolle de l'une des 24 unités « champignon », surfaces en matière plastique à double courbure. Un dispositif central permet également de placer de tous côtés le «champignon » sous traction. Pour la réalisation rentable de la forme établie, il s'est révélé nécessaire de renforcer les bords avec des cornières de fer. Ces renforts ont une signification analogue à celle des baleines d’un parapluie. Ils ne sont pas eux-mêmes portants

mais constituent l'élément d'une construction composite entre l'acier et le polyester à armature de fibre de verre. L’acceptation de cet effet de jonction posa naturellement une série de problèmes nouveaux dont le comportement ne pouvait être investigué que par l'experiment. Rarement, comme dans ce cas, l’essay sur modèle s'est révélé le seul moyen valable pour déterminer le comportement statique de la structure générale. On commença donc par établir, dans le matériau prévu, un modèle à l’échelle 1 : 6

dont on expérimenta la stabilité et la répartition des tensions. Sur la base des expériences seulement, on établit enfin les dimensions pour l’exécution.

Il appartient désormais à la critique du monde ambiant de juger si ce premier bâtiment, où la matière synthétique est sollicitée en qualité de surface portante (de grande envergure) et dont la réalisation fut soumise à la solution de multiples difficultés techniques, ouvre la voie à un champ nouveau de la création architectonique. Heinz Hossdorf

5 4 Pose du premier élément sur son pilier • Montage des ersten Pilzes ■ Erection of the first unit 6

4 Vue générale du chantier • Gesamtansicht der Baustelle ■ General view of the site

153