Roumanie

Constructions industrielles

L’exceptionnel développement économique de la Roumanie, commencé après la fin de la seconde guerre mondiale, regarde l’ensemble des activités du pays comme: industrie et agriculture, commerce et transports, habitation et loisirs. Tous ces domaines eurent, séparément ou dans leur totalité, d’importantes influences dans la vie sociale, économique et culturelle de la population. Les statistiques font voir que l’économie générale roumaine enregistra, au long de ces années, un important accroissement, de plus de 15% par an.

L’ensemble de la politique roumaine d’équipement d’après-guerre a été basé, et continue de l'être, sur l’industrialisation du pays, avec une prépondérance marquée pour l’industrie lourde et spécialement pour la construction d’outillages et de machines. L’accroissement de la production industrielle détermina à son tour d’importantes modifications dans la struc-

ture économique du pays, l’industrie devenant le facteur prédominant de l’économie nationale. Si l’on essayait de dénombrer — du point de vue architectural — les caractéristiques de ce développement industriel on pourrait signaler deux aspects.

Le premier est constitué par l'ensemble des projets industriels réalisés en tenant compte des systématisations régionales, urbaines, ou dans certains cas, des zones spécialisées.

Au cours des années, le nombre de ces dernières s’est beaucoup accru, rendant possible l’organisation de toute une série de travaux d’utilisation en commun de réseaux d’alimentation d’eau, thermiques, et énergétiques par des chantiers complexes spécialisés. Pour la réalisation de ces buts, d’étroites liaisons ont été établies entre les différentes unités appartenant à une même zone — ou entre l’ensemble de la zone — et les villes voisines.

Le second aspect concerne les avantages qu’offre l’organisation de la production dans des unités industrielles de grande envergure, évitant ainsi les dispersions. En effet, en 1963, le nombre des entreprises de plus de 2000 employés était de l’ordre de 44,2%. Ce qui est remarquable, surtout comparativement à l’Angleterre — le pays européen le mieux développé du point de vue industriel — qui, avec ses 55.739 entreprises (en 1959), compte seulement 1144 entreprises de plus de 1000 employés, soit un peu plus de 2 %. (Cf. British Industry & Town Planning. London.) Il est difficile, en un bref article, de montrer le formidable développement industriel du pays dans une période relativement si courte. Cependant, nous pouvons signaler quelques données. Ainsi, l’ancien plan de six ans n’eut que 500 unités de réalisées, alors que l’actuel plan a augmenté ce chiffre à 750 unités. Et, en exemple, la plus récente et importante organisation industrielle métallurgique — partiellement mise en

fonction — est le Complexe Sidérurgique « Gh. Ghiorgiu-Dej » de Galatz, avec une capacité de production de 5 millions de tonnes acier par an. La clarté du plan général, le groupement des différentes sections de fabrication, la façon dont ont été résolu les problèmes de construction des différentes halles, les particularités du terrain difficile, ayant un fort degré de séismicité, l’intérêt architectural des bâtiments et bien d’autres problèmes, font de cette industrie l’une des plus intéressantes réalisations de ces dernières années.

Dans le domaine de la construction des machines, les réalisations abondent. Outre les unités développées récemment à l’usine de fabrication de Brasov, nous pouvons signaler dans la même ville une autre unité pour la fabrications de tracteurs et une deuxième pour des roulements à billes. De même, on a réalisé, à Bucarest, une usine métallurgique, une usine de fabrication de machines et une troisième d’agrégats; à Ploesti, une usine d’outillage pétrolier, et à Pitesti une usine de fabrication de voitures automobiles, réalisée en collaboration avec les usines françaises « Renault ». La métallurgie non-féreuse est aussi bien représentée, tant du point de vue technologique que du point de vue architectural, par les deux ensembles industriels de Oradea et Stalina, spécialisés dans la fabrication de l’aluminium.

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4. Laminoir du complexe sidérurgique de Galatzi O. Popescu-Necsesti, architectes 5. Usine d'éléments préfabriqués en béton, Bucarest Gh. Polizu, arch.

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1.-3. Usine d'aluminium, Slatina Radica débattu, O. Popescu, arch.

22.2

Une attention particulière a été portée au développement de l’industrie chimique.

La zone industrielle de Borzesti-Onesti, réalisée il y a quelques années, s’étend sur 8 km de longueur et comprend toute une série d'industries de préparation de caoutchouc synthétique, de raffinerie de pétrole, de polyvinile... De même, la zone industrielle de Brada comprend une série de fabriques de cellulose, de papier, etc... et celle de Craiova, réalisée plus récemment, de fabriques d’engrais. Dispersées dans l’ensemble du pays, plusieurs usines chimiques avec des productions très différenciées: à Savinesti (usine de fibres synthétiques), à Riznov (engrais), à Bucarest (enveloppes de caoutchouc, médicaments), à Calarasi (cellulose, papier), et bien d'autres.

L'emplacement de l’outillage de certaines usines en plein air — les raffineries de Ploesti, de Brazi... — a donné lieu à la réalisation d’une brillante architecture de tuyauterie formant de véritables boulevards de conduits aériens. L’intérêt accordé au groupement des installations a eu les plus heureux effets, produisant une nouvelle architecture industrielle. Vues de nuit, l'effet de ces usines est formidable! Sans exagération, les mille lumières dont brille ce paysage industriel concurrencent les étoiles, constituant un argument contre ceux qui pensent que la véritable beauté ne peut s’inspirer que d’un idéal grec.

Un développement intéressant est aussi à mentionner dans l’industrie du bois, le fameux « or vert », devenu si rare dans certaines régions du globe. En Roumanie, les forêts couvrent 27% de la surface du pays, ce qui donne environ 0,34 ha par habitant. On peut signaler les grands complexes industriels de Suceava dans le Nord, et de Turnu-Severin dans le Sud; entre les deux, les centres de Pitesti, Tg.

Jiu, Blaj, Gherla, Comanesti, Jassi, et Bucarest, qui disposent de nombreuses usines de fabrication de meubles, menuiseries, et autres produits et agglomérés du bois.

Quant aux réalisations de l’industrie énergétique, signalons l’hydro-centrale de la rivière Arges, et celle en cours d’exécution sur le Danube, au point nommé « Portile de Fier » (portes en fer), en collaboration avec la Yougoslavie. Ces réalisations se distinguent par leur ampleur, leur intérêt architectural, et la préoccupation permanente d’intégrer ces œuvres dans la nature environnante ou d’établir des contrastes harmonieux.

Il est facile de déduire que tant de sujets de constructions industrielles, d’une si grande envergure, ont donné l’occasion d’une intense émulation de recherches artistiques et structurelles. Nos architectes ont donc été préoccupés par l’adoption de justes solutions tant du point de vue technique, économique et esthétique, que de l’occupation rationnelle et économique du sol. C’était justement le cas, par exemple, de l'ensemble industriel de Galatz qui occupe une surface de terrain de 600 ha, l’équivalent d’une ville de 120 000 habitants. L’assemblage des différentes sections de production dans des halles compactes, bien éclairées, — le laminoir pour la fabrication de toiles épaisses du même ensemble, occupe une surface bâtie de 200 000 m2— les problèmes concernant la standardisation des structures, préfabrication et usinage des éléments, unis à ceux d’ordre esthétique et architectural, forment d’autres questions auxquelles on a été obligé de répondre, quelquefois dans de très brefs délais.

Parallèlement à l’adoption des meilleurs emplacements technologiques, les architectes spécialisés dans cette architecture industrielle, se sont attachés à réaliser des compositions claires, d’assembler judicieusement des volumes harmonieux et d’obtenir la mise en valeur des caractéristiques spécifiques à chaque unité industrielle. Egalement, même souci d’offrir aux employés les meilleures conditions de travail, éclairage, ventilation et chauffage, et, préoccupation d’établir des intérieurs et extérieurs polychromes afin de satisfaire au confort et aux nécessités d’un cadre esthétique réussi. Une même attention a été donnée aux bâtiments culturels et sociaux, clubs et cantines, ainsi qu’à l’établissement d’espaces verts de surfaces rationnelles.

Par toutes ces réalisations, ayant à vaincre quelquefois de nombreuses difficultés et idées préconçues, l’architecture industrielle de notre pays poursuit avec persévérance son chemin, tâchant d’apporter sa modeste contribution à la création d’une architecture internationale de notre temps.

Salomon Zalman, Martin Pinchis, architectes

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1.-2. Usine de machines et outillage, Bucarest O. Popescu-Necsesti, arch.

3. Usine métallurgique, Jassi. O. PopescuNecsesti, arch.

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4. Fabrique de confection, Focsani M. Schaffhiitli, arch.

5. Fabrique de lait pasteurisé, Bacati Elena Jotzu, arch.