René Sarger

Le nombre et la diversité des questions posées par notre ami Anthony Krafft ouvrent un débat d’une telle importance qu’il semble particulièrement difficile, en quelques pages, d’y faire d’autres réponses que schématiques. Sans doute reste-t-il un choix à faire entre ces questions, et ce choix même indiquera au lecteur les principales préoccupations, le plus souvent actuelles. Nous sommes tous d’accord pour constater que l’architecture est malade. Mais cette maladie est-elle une maladie de vieillesse ou de croissance? Ici, les opinions peuvent varier et les positions s’opposer.

Cette crise annonce-t-elle un déclin ou une révolution de l’architecture?

Je pense utile de dire, d’emblée, ma pensée à ce sujet.

La crise actuelle annonce le déclin d’une certaine conception de l’architecture et la naissance d’une nouvelle. Cette transition est révolutionnaire.

Comment pourrait-il en être autrement si l’on considère que l’architecture est le reflet de la société et que l’on constate que cette société est en pleine mutation économique, sociale et politique. Car non seulement l’architecture ne peut être indépendante de la société (et fondamentale du développement de ses forces productives) mais, de plus, elle ne peut, d’elle-même, apporter ni progrès, ni modification sur le plan humain et social. Elle peut seulement accélérer ou retarder le progrès de l’humain et du social.

L’idée que l’architecture, en tant qu’art, puisse, comme le pensait Gropius, «être le plus puissant des moyens de réforme sociale» est une illusion utopique et technocratique particulièrement vivace.

Technocratique, dans le sens où la spécificité du travail de l’architecte est considérée comme supérieure à la pratique politique, quelle qu’en soit la valeur à un moment donné; utopique, dans la mesure où elle annonce justement une nouvelle conception de l’architecture sans en avoir socialement les moyens.

Jusqu’au début du XXe siècle, l’architecture est, en effet, considérée comme un luxe nécessaire uniquement au «prince» et au prestige des classes dominantes.

Les architectes sont formés dans ce sens.

A de rares exceptions près, ils n’exercent leur art que pour édifier des palais, des temples, des villes de garnison, des châteaux, des hôtels particuliers.

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Zahl und Verschiedenheit der von unserem Freund Anthony Krafft gestellten Fragen eröffnen eine Debatte von solcher Bedeutung, dass es besonders schwierig scheint, einige der Aspekte nicht allzu schematisch zu beantworten. Ohne Zweifel ist es einem überlassen, eine Wahl zwischen den verschiedenen Fragen zu treffen, und diese Wahl wird dem Leser klarmachen, welche die hauptsächlichen und aktuellsten Aspekte sind. Wir stimmen alle mit der Feststellung überein, dass die Architektur krank ist. Ist diese Krankheit aber eine Alters- oder eine Wachstumserscheinung? Die Ansichten darüber können variieren und verschiedene Standpunkte einander gegenüberstehen.

Kündigt diese Krise einen Niedergang oder eine Revolution der Architektur an?

Es scheint mir nützlich, von vornherein meine diesbezüglichen Gedanken darzulegen.

Die derzeitige Krise kündet den Verfall einer gewissen Auffassung von der Architektur an und die Geburt einer neuen. Dieser Übergang ist revolutionär.

Wie könnte es anders sein, wenn man betrachtet, dass die Architektur der Spiegel der Gesellschaft ist, und man merkt, dass diese Gesellschaft in voller Wandlung begriffen ist, sowohl wirtschaftlich als auch sozial und politisch?

Denn die Architektur muss nicht nur von der Gesellschaft abhängen (und grundsätzlich von der Entwicklung der produktiven Kräfte), sondern sie kann darüber hinaus von sich aus weder Fortschritte noch Veränderungen auf der menschlichen und sozialen Ebene beisteuern. Sie kann einzig den menschlichen und sozialen Fortschritt beschleunigen oder verzögern.

Der Gedanke, dass die Architektur als eine Kunstart, wie Gropius dachte, «das mächtigste aller sozialen Reformmittel» sein könnte, ist eine besonders lebendige utopische und technokratische Illusion.

Technokratisch in dem Sinne, als die Eigenart der Architektenarbeit der politischen Praxis überlegen zu sein scheint, welches auch immer ihr Wert in einem bestimmten Augenblick sein mag. Utopisch in dem Masse, in dem sie gerade eine neue Konzeption der Architektur ankündigt, ohne jedoch, sozial gesehen, bisher die Mittel dazu zu haben.

Bis zu Beginn des 20. Jahrhunderts wird

The number and variety of questions set by our friend Anthony Krafft leads to a debate of such importance that it seems particularly difficult, in one or two pages, to give other than schematic answers. Without doubt a choicecan be made between the various questions and even this choice will indicate to the reader the principal preoccupations of the author and very often his actual problems. We are all in agreement with the statement that architecture is sick. But this illness is it an illness of age or of growth? Here the opinions can differ and opposite positions be taken.

This crisis does it herald a decline in architecture or a revolution?

I think it useful to state, here and now, my feelings on this subject.

The present crisis indicates the decline of a certain conception of architecture and the birth of a new one. This transition is revolutionary.

How can it be otherwise if one considers that architecture is the reflection of society and one observes that this society is in full economic, social and political mutation. For, not only is architecture incapable of being independent of society (and fundamentally of the development of its productive forces) but in addition, it cannot by itself bring about either progress or change on the human and social level. It can only speed up or delay this same human and social progress.

The idea that architecture, as an art, can be, as Gropius declares, ‘the most powerful means of social reform ...’ is a utopian and technocratic illusion that is particularly long-lived.

Technocratic in the sense that the specificity of the architects’ work is, in fact, considered as a necessary luxury only for princes and for the prestige of the ruling classes. The architects are trained in this atmosphere. Except for rare exceptions, they do not practise their art except to build palaces, temples, garrison towns, country seats, individual mansions.

It was the new socialist ideas, born of a different milieu, which after the First World War led the best of them to insist that the architect works for the population, for all men.

This new conception of the practice of our profession now makes us recognize as architectural works the creations without architects in which no qualified ‘architect’ would lower himself to collab-

Paris. La tour Eiffel.

A vant-projet architectural. E. Sauvestre.

Architektonischer Vorentwurf.

A preliminary architectural project.

La réalisation.

Die Ausführung.

The construction.

Pier Luigi Nervi.

Petit Palais des sports. Rome.

Architecture ou construction?

Konstruktion oder Architektur?

Architecture or building?

Maillard. Pont sur la Salgine.

Construction ou architecture?

Architektur oder Konstruktion?

Building or architecture?

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René Sarger

Ce sont les nouvelles idées socialistes, nées en dehors d’eux, qui vont amener, après la première guerre mondiale, les meilleurs d’entre eux à exiger que l’architecte travaille pour les hommes, pour tous les hommes.

Cette nouvelle conception de l’exercice de notre profession nous fait maintenant reconnaître, comme œuvres architecturales, les réalisations sans «architectes» auxquelles aucun «architecte» en titre ne se serait abaissé à collaborer.

Deux raisons à cette attitude : - l’architecture, étant un art, ne pouvait s’adresser qu’à une élite, étant entendu que l’élite est celle qui a les moyens financiers de passer commande; - considérée comme un art supérieur à la technique, l’architecture n’admettait celle-ci que comme moyen de réalisation et non comme source.

C’est cette conception de dédain du service des hommes en général et de la technique en particulier qui s’écroule actuellement.

Allons-nous, alors, vers une domination de la technique sur l’architecture? Poser ainsi la question est un faux problème.

Car le développement de toutes les techniques sociales et constructives porte, sans doute, un coup mortel à une certaine architecture. Mais, la fin d’un monde n’est pas la fin du monde.

Une nouvelle conception de l’architecture est née, déjà, qui va prendre comme sources non plus les besoins d’une certaine classe sociale, mais ceux - nous l’avons vu - de toutes les classes et en premier lieu des plus nombreuses; elle prend également comme sources les techniques de production les plus avancées.

Alors, sans doute, l’architecte formé aux modes de pensées du siècle dernier craint d’être dominé par la technique, comme d’autres ne veulent pas s’abaisser à faire des logements sociaux.

Or, technique et sociologie ont fait des progrès foudroyants, ces derniers temps, dans la pensée de tous ceux qui participent ou veulent participer à la création architecturale.

Cependant, les réalisations modernes en tenant compte ne sont encore que peu nombreuses. Car toute révolution est d’abord une lutte d’idées contre les traditions et les conceptions périmées. Ces réalisations sont parfois contradictoires, sans liens apparents, encore influencées 138

die Architektur tatsächlich als ein einzig dem «Prinzen» und dem Prestige der herrschenden Klassen nützlicher Luxus betrachtet. Die Architekten wurden in diesem Sinne ausgebildet. Bis auf einige wenige Ausnahmen üben sie ihre Kunst nur aus, um Paläste, Tempel, Garnisonsstädte, Schlösser und Herrschaftshäuser zu errichten.

Es waren die neuen, ohne ihr Zutun geborenen sozialistischen Ideen, die nach dem Ersten Weltkrieg die Besten unter ihnen zu der Forderung verleiteten, dass die Architektur für Menschen, alle Menschen, arbeiten müsse. Diese neue Auffassung von der Ausübung unseres Berufes hat bewirkt, dass wir jetzt Werke als architektonische Werke anerkennen, zu deren Ausführung sich kein «Titelarchitekt» herabgelassen hätte.

Für diese Einstellung gibt es zwei Gründe : - Die Architektur als eine Kunstart konnte sich nur an eine Elite wenden, wobei man sich darüber klar sein muss, dass die Elite diejenigen sind, die die finanziellen Mittel haben, Bestellungen aufzugeben.

- Da die Architektur als eine der Technik überlegene Kunst betrachtet wurde, konnte sie diese nur als ein Mittel zum Zweck, nicht aber als eine schöpferische Quelle anerkennen.

Gerade diese Geringachtung des Dienstes der Menschen im allgemeinen und der Technik im besonderen ist im Erlöschen begriffen.

Gehen wir also einer Beherrschung der Architektur durch die Technik entgegen?

So ist die Frage falsch gestellt. Denn die Entwicklung aller sozialen und baulichen Techniken versetzt einer gewissen Architektur ohne Zweifel den Todesstoss. Aber das Ende einer Welt bedeutet nicht das Ende der Welt. Eine neue Auffassung der Architektur ist bereits geboren. Sie wird als ihre Kraftquelle nicht mehr die Bedürfnisse einer gewissen Sozialklasse haben, sondern, wie wir gesehen haben, diejenigen aller Klassen und in erster Linie diejenigen der Mehrzahl. Sie schöpft ihre Kraft ebenfalls aus den fortgeschrittensten Produktionstechniken.

Selbstverständlich fürchtet der in der Denkweise des letzten Jahrhunderts geformte Architekt, von der Technik beherrscht zu werden, genau wie andere sich nicht dazu herablassen können, Sozialwohnungen zu bauen.

orate. There are two reasons for this attitude : - that architecture, because it was an art, could only apply to the élite, it being understood that the élite are those who have the financial means to place an order; - considered as an art superior to technique, architecture only admits the latter as a means of realization and not as a source.

It is this conception of disdain for the service of men in general and for technique in particular that is now collapsing.

Are we heading towards a domination of architecture by technique? Set thus the question is a false problem. For the development of all the social and constructive techniques deals, without doubt, a deadly blow to a certain architecture.

But the end of one world is not the end of the world.

A new conception of architecture has already been born, which will no longer have as its sources the needs of a certain social class but, as we have seen, the requirements of all the classes and first of all that of the greatest numbers; it will also have as source the most advanced techniques of production.

Without doubt, therefore, the architect formed by the way of thinking of the last century fears that he will be dominated by technique, just as others do not want to lower themselves to create subsidized housing.

However, technique and sociology have made lightning progress recently in the minds of all those who participate, or who wish to participate, in architectural creation.

Nonetheless, modern works are, in fact, still not very numerous. For every revolution is first of all a battle of ideas against traditions and out-of-date views. These works are often contradictory, without apparent links, frequently still influenced by the old ideas that are being fought against.

Are there not among the best of us some who still think that architecture is fundamentally different from building? Let them remember that we admire now as an architectural work that which in the last century was only considered as a building. The Galerie des machines was destroyed and we have kept the GrandPalais (and it was not for its covering of metallic ribs which is now admired).

souvent par les vieilles conceptions cependant combattues.

N’y a-t-il pas, parmi les meilleurs d’entre nous, certains qui pensent encore que l’architecture est fondamentalement différente de la construction? Qu’ils se souviennent que nous admirons, maintenant, en tant qu’œuvre architecturale, ce qui n’était considéré au siècle dernier que comme construction. La Galerie des machines a été détruite et nous avons conservé le Grand-Palais (et ce n’est pas pour sa couverture en charpente métallique maintenant admiré).

Le projet de Paxton pour le Crystal Palace a été retenu contre tous les projets architecturaux parce qu’il était un palais «des techniques» et non destiné à glorifier l’architecture. Plus près de nous, Maillard a dû se battre pour que ses ponts ne soient pas décorés de motifs architecturaux; avait-il tort ou avait-il une autre conception de l’architecture que ceux qui se réservaient, à l’époque, le droit de création architecturale et censuraient son œuvre?

Qui nous permet de juger aujourd’hui que telle construction, œuvre d’un technicien, ne sera pas demain considérée comme une œuvre d’architecture? Avonsnous un jugement plus sain que nos maîtres d’hier? Aurions-nous soudain découvert les critères du jugement de l’Histoire? Et si je me suis donné personnellement ces critères, n’y a-t-il pas quelque vanité à penser qu’ils sont les seuls justes et cela éternellement?

Voici les raisons de l’incohérence apparente dans les recherches actuelles, incohérence due à l’ébranlement des conceptions anciennes en attendant qu’un nouvel équilibre, temporaire, vienne enfin satisfaire notre besoin d’unité.

Mais ces recherches ne peuvent avoir de suites durables que dans la mesure où elles adhèrent à la réalité sociale et technologique et où elles s’insèrent dans le mouvement des grandes mutations de la société actuelle.

Cette réflexion me semble encore plus nécessaire dans les disciplines de l’urbanisme. Comment être urbaniste sans comprendre que la réalité sociale (programme) et . la réalité technologique (concrétisation) sont les sources réelles de notre création ? Cette réalité se meut dans un sens. Si ce mouvement n’est pas compris, la ville créée aujourd’hui sera-t-elle valable demain?

Doch Technik und Soziologie haben in der letzten Zeit in der Vorstellungswelt derjeniger, die an der architektonischen Schöpfung teilhaben oder teilhaben wollen, unglaubliche Bedeutung errungen.

Die modernen Werke sind indessen, wenn man es genau nimmt, noch wenig zahlreich. Denn jede Revolution ist zunächst ein Kampf der Ideen gegen die Traditionen und überlebten Vorstellungen. Die bislang ausgeführten Werke sind manchmal widersprüchlich, ohne klare Verbindungen, oft noch von alten, bereits bekämpften Vorstellungen beeinflusst.

Gibt es nicht unter den Besten von uns gewisse Leute, die noch meinen, die Architektur unterscheide sich grundlegend vom Bauhandwerk? Sie sollten daran denken, dass wir heute als architektonische Bauwerke betrachten, was man im vorigen Jahrhundert nur als Bau betrachtete. Die Galerie des machines wurde zerstört, und wir haben das GrandPalais bewahrt (und das nicht wegen seiner heute bewunderten Metallbedachung).

Paxtons Projekt für den Crystal Palace ist allen architektonischen Projekten vorgezogen worden, da es sich um einen Palast «der Technik» handelte, der nicht dazu bestimmt war, die Architektur zu verherrlichen. Der uns recht nahe stehende Maillard musste dafür kämpfen, dass seine Brücken nicht mit Architekturmotiven geschmückt wurden. Hatte er unrecht oder besass er eine andere Auffassung von der Architektur als jene, die sich zu der Zeit das Recht zur architektonischen Schöpfung vorbehielten und sein Werk zensurierten?

Was gibt uns ein Recht, heute zu beurteilen, ob dieser oder jener Bau, das Werk eines Technikers, nicht morgen als ein Architekturwerk betrachtet wird?

Haben wir ein gesünderes Urteil als unsere Meister von gestern? Sollten wir plötzlich die Kriterien des historischen Urteils entdeckt haben? Ist der Gedanke, dass sie die einzigen Gerechten sind, und das auf ewig, nicht eitel?

Das sind die Gründe für die offenkundige Zusammenhangslosigkeit der gegenwärtigen Forschungsanstrengungen. Diese Zusammenhangslosigkeit verdanken wir der Erschütterung der alten Vorstellungen, während wir darauf warten, dass ein neues, temporäres Gleichgewicht endlich unser Einheitsbedürfnis befriedigen wird.

Paxton’s project for the Crystal Palace was chosen out of all the architectural projects because it was a palace of techniques and not destined for the glorification of architecture. Nearer in time, Maillard had to fight so that his bridges were not endowed with architectural motives; was he wrong or had he a conception of architecture other than that of those who guarded, at the time, the right to architectural creation and who censured his work?

Who authorizes us to judge today that such a construction, the work of a technician, will not tomorrow be considered as an architectural work? Have we a more healthy judgement than our Masters of yesterday? Have we suddenly discovered the criteria of judgement of History?

If I, personally, have given myself criteria is it not somewhat vain to think that they are the only ones that are just and this eternally?

Here are the reasons for the apparent incoherence in present-day research, an incoherence which is due to the entanglement of old ideas while waiting for a new provisional balance, which will finally satisfy our need for unity.

But these researches can only have lasting results as long as they stick to social and technological reality and insert themselves into the movement of the great mutations of present-day society.

This reflection seems to be even more necessary in the discipline of town planning. How can one be a town planner without understanding that the social reality (programme) and the technological reality (concretization) are the real sources of our creation? This reality strangles itself in one sense. If this movement is not understood, the town created today will it be valuable tomorrow?

On this topic, I do not think that the fragmentary experiences of urbanism that have been carried out almost everywhere are of a kind to support a really positive reply. We are at present rediscovering town planning.

The seizing of power during the last centuries by the middle classes was done in the name of individual liberty to contract, which is incompatible with the idea of a collective plan for development.

There is no true town planning without collective appropriation of the land; even though this appropriation is in

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René Sarger

A ce sujet, je ne pense pas que les expériences d’urbanisme fragmentaires réalisées un peu partout soient de nature à apporter une réponse réellement positive.

Nous redécouvrons actuellement l’urbanisme.

La prise du pouvoir, au cours des siècles derniers, par la bourgeoisie s’est faite au nom d’une liberté individuelle d’entreprendre incompatible avec la notion d’un plan collectif de développement.

Il n’y a pas d’urbanisme véritable sans appropriation collective du sol; or, cette appropriation est parcellaire. Les expériences d’urbanisation seront donc parcellaires là où le sol reste propriété privée. Là où la société admet le profit comme moteur du progrès industriel, c’est un vœu pieux que d’exiger que les pouvoirs publics s’opposent à la spéculation foncière.

En France, les grandes réalisations d’urbanisme n’ont pu exister que grâce à la spéculation, non contre elle! Le quartier des Ternes à Paris, comme l’opération Haussmann, en sont les exemples les plus fameux, sans parler de la création des lignes de chemin de fer sur le plan national.

Dans une société qui s’est transformée en pouvoir des monopoles privés, il est particulièrement ridicule de penser qu’une opération d’urbanisme puisse être réalisée sans spéculation. C’est le morcellement de la propriété foncière qui est l’obstacle majeur, non la spéculation. Le remembrement du sol, nécessaire, peut se faire soit par l’appropriation collective, soit par l’appropriation privée monopolisant partiellement le territoire. Et les «pouvoirs publics» favoriseront telle ou telle solution, selon qu’ils représentent l’intérêt collectif ou celui des monopoles privés.

Quant aux solutions spontanées ou sauvages, qui peut prétendre qu’elles ne portent en elles aucune réponse aux besoins profonds d’humanisme des masses. Serait-il inconvenant de rappeler que les «bidonvilles» qui se sont créés autour de Brasilia répondent mieux aux besoins d’échanges humains que la «grande réalisation» même. C’est un fait cependant que, malgré les espaces encore vierges, la concentration démographique nous pose un problème de réflexion urbaine.

Notons que nous en sommes à redécouvrir l’urbanisme: Alexandre a été le

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Diese Forschungsanstrengungen können aber nur in dem Masse dauerhafte Erfolge haben, in dem sie die technologische und soziale Wirklichkeit anerkennen und insofern sie sich in die Bewegung der grossen Veränderungen in der heutigen Gesellschaft einfügen.

Dieser Gedankengang scheint mir für die Städtebaulehren noch zutreffender.

Wie kann man Städtebauer sein, ohne zu verstehen, dass soziale Wirklichkeit (Programm) und technologische Wirklichkeit (Durchführung) die realen Quellen unseres Schaffens sind? Diese Realität bewegt sich in gewissem Sinne. Wenn diese Bewegung nicht verstanden wird, wird dann die heute geschaffene Stadt morgen noch Gültigkeit besitzen?

In dieser Sache glaube ich nicht, dass die hier und da durchgeführten bruchstückhaften Städtebauversuche beschaffen sind, eine wirklich positive Antwort zu geben. Wir werden den Städtebau erst wiederentdecken.

Die Machtergreifung durch das Bürgertum im Verlaufe der letzten Jahrhunderte geschah im Namen einer individuellen Unternehmensfreiheit, die mit dem Begriff eines kollektiven Entwicklungsplans unvereinbar war.

Es gibt keinen wirklichen Städtebau ohne einen gemeinsamen Besitz des Bodens.

Doch dieser Besitz ist Stückwerk. Die Städtebauversuche werden also immer da parzellarisch sein, wo der Boden Privateigentum bleibt. Da, wo die Gesellschaft den Profit als den Motor des industriellen Fortschritts zulässt, ist es ein frommer Wunsch, zu fordern, dass sich die Staatsmacht der Bodenspekulation entgegenstellt.

In Frankreich konnten die grossen Städtebauwerke nur dank der Bodenspekulation, und nicht gegen sie, bestehen. Das Ternes-Viertel in Paris wie auch die Operation Haussmann sind die berühmtesten Beispiele dafür, ohne von der Schaffung des nationalen Eisenbahnnetzes zu sprechen.

In einer Gesellschaft, die sich in eine Macht der Privatmonopole verwandelt hat, ist der Gedanke, dass eine Städtebauoperation ohne Spekulation durchgeführt werden könnte, besonders lächerlich. Die Aufteilung des Grundbesitzes wirft das grösste Hindernis auf und nicht die Spekulation. Die notwendige Neuaufteilung des Bodens kann entweder durch kollektive oder private Besitznahme,

small lots. The experiences of town planning will therefore be in small areas where the land remains private property. Where the society admits that profit is the instigator of industrial progress, it is a pious wish to demand that public administrations should oppose land speculation.

In France the major works of town planning have only been possible thanks to speculation, not in opposition to it! The Ternes quarter in Paris and the Haussmann operation are the most famous examples, not to mention the creation of the railways on a national scale.

In a society that is transformed into private monopolies, it is particularly ridiculous to think that a town planning operation can be carried out without speculation. It is the splitting up of estates which is the major obstacle, not speculation. The regrouping of the land, which is necessary, can be done either by collective appropriation or by private appropriation, partially monopolizing the land. The ‘public administrations’ favour such and such a solution according to how they view the collective interest or that of the private monopolies.

As to the spontaneous or wild solutions, which can pretend that they contain the reply to the profound needs of the humanism of the masses, would it be inconvenient to remember that the bidonvilles which have been created around Brasilia are a better reply to the needs for human exchanges than the ‘major works’ themselves? It is a fact, however, that in spite of the still untouched space, the demographic concentration sets us a problem of reflection for town planning.

Note that we are in fact rediscovering town planning: Alexander was the promoter of a score of Alexandrias, Peter the Great founded St. Petersburg, the middle classes created colonial towns during the imperial splitting up of underdeveloped countries.

But how many new towns have been created in Germany, France, Italy and England during the last century? The development of individualism opposes it in principal, and in England one thinks of town planning for India, in France for Morocco, in Hitler’s Germany to assert the domination of the Reich in the Eastern territories.

As all new sciences, town planning will be first of all static and analytical. One

promoteur d’une vingtaine d’AIexandries, Pierre le Grand a fondé Pétrograd, la bourgeoisie a créé des villes coloniales lors du partage impérialiste des pays sous-développés.

Mais combien de villes nouvelles a-t-on créé en Allemagne, en France, en Italie, en Angleterre, depuis un siècle? Le développement de l’individualisme s’y oppose par principe, et l’on pense urbanisme en Angleterre pour les Indes, en France pour le Maroc, en Allemagne hitlérienne pour asseoir la domination du Reich dans les territoires de l’Est.

Comme toute nouvelle science, l’urbanisme sera d’abord statique et analytique. On décompose la ville en zones d’activités, en fonctions isolées les unes des autres, et l’on s’étonne que cette dichotomie ne soit pas «humaine»?

Depuis des millénaires, la ville est un lieu collectif où les hommes habitent, travaillent, se cultivent, se reposent et circulent.

Il semble que l’on redécouvre cette vérité première, mais pour couper ces fonctions les unes des autres, tout en essayant d’en fixer une fois pour toutes les importances relatives.

Or, l’homme en tant qu’être vivant n’est pas l’addition des organes de la vue, de l’ouïe, de la digestion, de la locomotion, de la réflexion, etc. Mais il en est l’intégration synthétique et dialectique dans un devenir prospectif. Tous les échecs connus proviennent d’une vision rudimentaire ignorante de ce qui est la complexité de la vie.

Il nous faut faire un grand effort de synthèse pour admettre que si la vivisection de l’être urbain nous est utile, elle n’est pas suffisante à la création d’une vie urbaine.

Cette sociologie urbaine nous manque, tout autant que notre connaissance des moyens techniques à la disposition de nos enfantements.

La concentration urbaine nécessite des sols à occuper. Déjà, de nombreux utopistes proposent la création de sols artificiels. Leurs propositions sont utopiques dans la mesure où ils ne voient ni ne prévoient les moyens techniques et sociaux de cette création. Jules Verne a prévu le voyage autour de la Lune mais par le moyen d’un obus et non d’une fusée; il a prévu le sous-marin propulsé par l’électricité et non par l’énergie atomique.

Ces anticipations sont valables mais non

die das Landesgebiet teilweise monopolisiert, geschehen. Und die Staatsmacht wird diese oder jene Lösung begünstigen, je nachdem ob sie das Gemeinwohl oder die Privatmonopole repräsentiert.

Was die spontanen oder wilden Lösungen anbetrifft, wer könnte behaupten, dass sie überhaupt keine Antwort auf die tiefgreifenden Bedürfnisse des Massenhumanismus in sich bergen? Ist es unpassend, daran zu erinnern, dass die Barackenstädte, die rings um Brasilia entstanden, besser dem Bedürfnis nach menschlichem Kontakt entsprechen als das «grosse Werk» selbst? Es ist indessen eine Tatsache, dass, trotz des noch unerschlossenen Gebietes, die demographische Konzentration uns ein städtebauliches Denkproblem aufgibt.

Beachten wir, dass wir dabei sind, den Städtebau wiederzuentdecken : Alexander war der Schöpfer von ungefähr zwanzig Alexandrien, Peter der Grosse gründete Petersburg, das Bürgertum schuf die Kolonialstädte anlässlich der imperialistischen Aufteilung der unterentwickelten Länder.

Aber wieviel neue Städte sind seit einem Jahrhundert in Deutschland, Frankreich, Italien und England geschaffen worden?

Die Entwicklung des Individualismus steht dem aus Prinzip entgegen, und denkt man in England an Städtebau, so meint man Indien, in Frankreich Marokko und in Hitler-Deutschland die Befestigung der Herrschaft des Reiches über die Ostgebiete.

Wie jede neue Wissenschaft wird der Städtebau zunächst statisch und analytisch sein. Man zerlegt die Stadt in Tätigkeitsbereiche, in voneinander getrennte Funktionen und ist dann erstaunt, dass dieser Zwiespalt nicht «menschlich» ist.

Seit Jahrtausenden ist die Stadt ein kollektiver Ort, an dem Menschen wohnen, arbeiten, sich kultivieren, sich erholen und miteinander verkehren. Es scheint, dass man diese Grundwahrheit wiederentdeckt, doch nur um eine Funktion von der anderen zu trennen, wobei man gleichzeitig versucht, ein für allemal deren relative Bedeutung festzulegen.

Der Mensch als ein Lebewesen ist jedoch nicht die Summe der Seh- und Hörorgane, der Verdauung, der Fortbewegung, des Denkens usw.... Sondern er ist die synthetische und dialektische Integration von alledem in einem Vorsplits up the town into zones of activity, functions are isolated one from the other and one is surprised that this dichotomy is not ‘humane’.

For thousands of years, the town has been a collective place where men live, work, educate themselves, rest and circulate. It seems that one rediscovers this first truth while cutting off the various functions one from the other, while trying to fix once and for all the relative importances.

Therefore, man as a living being is not the sum of the organs of view, of hearing, of digestion, of locomotion, of reflection, etc. He is the synthetic and dialectic integration in a prospective progressive movement. All the known setbacks come from abstract, scientific, technocratic mechanics, from an ignorant rudimentary vision of what is the complexity of life.

It is necessary for us to make a big effort of synthesis to admit that if the vivisection of the town dweller is useful to us, it is not sufficient for the creation of town life. The town sociology is missing, just as much as our knowledge of the technical means at the disposition of our birth.

The urban concentration requires land to occupy. Already, many Utopians propose the creation of artificial land. Their propositions are utopian to the extent that they neither see, nor foresee, the technical and social means of this creation. Jules Verne forecast the journey round the moon but by means of a shell and not by a rocket; he forecast the submarine propulsed by electricity and not by atomic energy.

These forecasts are valuable but not the means nor the form of their realizations which depend on the development of the productive forces of the society. It is the same thing for the most recent theories of town planning. The principles are right, the realization impossible, as long as one remains in the era of the sailing ship and the oil lamps of father.

Here again it is a question of technique and technology.

Therefore it is possible today to reply to the urban concentration by the necessary creation of artificial ground but on the condition that one reviews all the formal ideas which we have inherited from our culture.

For culture is like the tongue of Aesop,

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les moyens ni les formes de leurs réalisations qui dépendent du développement des forces productives de la société. Il en est de même des théories les plus récentes sur l’urbanisme. Les principes en sont justes, la réalisation impossible, tant que l’on reste dans la marine à voile et les lampes à huile de papa.

C’est bien ici encore une question technique et technologique.

Or, il est possible aujourd’hui de répondre à la concentration urbaine par la création nécessaire de sols artificiels, mais à condition de remettre en cause toutes les notions formelles que nous lègue notre culture.

Car la culture est comme la langue d’Esope, à double face; comme Janus, tourné vers le passé dans la contemplation et la «sagesse», tourné vers l’avenir dans l’action et la «folie».

Agir dans la sagesse, contempler dans la folie, telle est, me semble-t-il, l’attitude nécessaire du créateur. Telles sont les réflexions livrées à la critique de nos amis.

R. S.

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gang des prospektiven Werdens. Alle erlittenen Niederlagen rühren von einer abstrakten wissenschaftelnden und technokratischen Mechanik her, von einer unwissenden, unvollständigen Vision dessen, was die Komplexität des Lebens ausmacht.

Wir müssen uns im Hinblick auf eine Synthese sehr um das Eingeständnis bemühen, dass, wenn uns die Vivisektion des Stadtwesens auch von Nutzen ist, sie doch nicht zur Schaffung eines Stadtlebens ausreicht.

Diese Soziologie der Stadt fehlt uns, und ebenso fehlt uns die Kenntnis von den technischen Mitteln, die uns für deren Schaffung zur Verfügung stehen.

Die städtische Konzentration benötigt verfügbaren Boden. Zahlreiche Utopisten schlagen bereits die Errichtung künstlicher Flächen vor. Ihre Vorschläge sind insofern utopisch, als sie die technischen und sozialen Mittel dieser Vorhaben weder sehen noch vorsehen. Jules Verne sah die Reise um den Mond voraus, aber mittels eines Geschosses und nicht einer Rakete. Er sah das elektrisch getriebene U-Boot voraus, aber nicht das atomgetriebene.

Diese Voraussichten haben Gültigkeit, nicht aber die Mittel oder die Formen ihrer Verwirklichung, die von der Entwicklung der Produktivkräfte der Gesellschaft abhängen. Das gilt auch für die neuesten Städtebautheorien. Deren Prinzipien sind richtig, doch eine Verwirklichung ist unmöglich, solange man sich bei der Segelschiffahrt oder Papas Öllampen aufhält.

Auch das ist eine technische und technologische Frage.

Es ist heute möglich, auf die Stadtkonzentration mit der Errichtung von künstlichen Flächen zu antworten, aber nur unter der Bedingung, dass man alle formellen Begriffe, die uns unsere Kultur verleiht, in Frage stellt. Denn die Kultur ist zweideutig wie die Sprache Äsops.

Wie Janus, der sich betrachtend und «weise» der Vergangenheit zuwendet, handelnd und «verrückt» aber der Zukunft.

Weise handeln, verrückt betrachten, das scheint mir die nötige Einstellung des Schöpfers zu sein. Solcherart sind die Gedanken, mit denen wir der Kritik unserer Freunde begegnen.

R. S.

two-faced : like Janus turned towards the past in contemplation and ‘wisdom’, turned towards the future in action and ‘folly’.

To act in wisdom, to contemplate in folly, that seems to me the necessary attitude of the creator. Such are the reflections presented for the criticisms of our friends.