Espace

Groupe suisse

Dix-huit peintres, sculpteurs, architectes et critiques d’art venant de toutes les régions de la Suisse se sont réunis au Château de la Sarraz les 29 et 30 mai 1954. Au terme de la discussion d’un rapport présenté par le sculpteur Gisiger a été décidée la fondation d’un groupe suisse ESPACE.

En Suisse, comme dans tous les pays, la question des rapports de l’art avec l’architecture se pose avec une urgence qu’ignorent souvent les associations professionnelles. Il est heureux, par conséquent, que tous ceux qui ressentent la nécessité d’un dialogue à ce sujet s’unissent et œuvrent ensemble pour tenter d'incarner l’esthétique en l’accordant aux techniques et à la sensibilité de notre époque.

Ce thème général fut étudié avec sérieux et passion au cours des deux journées passées au Château de la Sarraz. Il fut repris également dans les conversations amicales poursuivies par les participants au long des allées fleuries d’un magnifique parc où planent encore l’ombre des CIAM et celle du Congrès international du cinéma indépendant.

Voici la liste des membres fondateurs du groupe suisse ESPACE :

M. H. Brechbühler, architecte

M. G. Brera, architecte

M. A. Foretay, architecte

M. E. Gisel, architecte

M. W. Moser, architecte

M. A. Roth, architecte

M. O. Senn, architecte

M. T. Vadi, architecte

M. P. Waltenspuhl, architecte-ing.

M. W. Bodmer, peintre

M. C. O. Chollet, peintre

M. Dalvit, peintre

M. T. Eble, peintre

M. R. P. Lohse, peintre

M. J.-G. Gisiger, sculpteur

M. L. Prébandier, sculpteur

M. M. Péclard, styliste

M. G. Honegger-Lavater, graphiste

M. F. Buache, journaliste

M. Dr H. Curjel, critique d’art

Mme Giedion-Welcker, critique d’art

M. S. Giedon-Welcher, historien d’art

M. G. Peillex, critique d’art

M. Dr G. Schmidt, critique d’art

Après l’adoption des Statuts, le Comité a été constitué de la manière suivante : Président : Vice-présidents : Secrétaire : Trésorier : Membres : 42

M. Alfred Roth.

M. Walther Bodmer et J.-G. Gisiger.

M. Freddy Buache.

M. Richard P. Lohse.

Madame C. Giedion-Welcker.

M. Otto Senn.

M. Michel Péclard.

Sur la proposition de M. Alfred Roth, président, le Groupe Suisse ESPACE étudie le projet d’une exposition qui pourrait être organisée au printemps 1956 au Kunstgewerbemuseum de Zurich. Elle serait placée sous le titre SYNTHESE DES ARTS (BAU UND BILD) et illustrerait un programme qui, résumé succinctement, comprendrait les caractères suivants : Première Section : plan de l’Exposition.

Explication des raisons artistiques, culturelles, spirituelles et sociales de la synthèse des arts.

Deuxième Section : synthèse des arts dans le passé.

Exemples éminents de la synthèse des arts choisis dans les civilisations du passé comme dans celles de peuplades primitives préhistoriques et présentes.

Le choix des exemples se ferait sur la base des dernières connaissances de la science moderne des civilisations. Le texte accompagnant les photographies expliquerait les raisons qui ont fait choisir les exemples et démontrerait que les conditions pour de telles réalisations furent : le besoin et la volonté pour une synthèse, l’unité des conceptions spirituelles et artistiques.

Troisième Section : l’historisme, le renouvellement du travail artistique.

L’académisme et Thistorisme du 19me siècle ont interrompu la continuité du travail créateur artistique, exprimant son époque.

L’imitation de la nature et des styles du passé ont faussé le sens et l’existence des arts et ont éliminé la nécessité intérieure de la synthèse.

Exemples photographiés de cette période négative.

Vers 880/90, on redécouvre les bases véritables de la création artistique. « Art nouveau » et « Jugendstil » créent les bases spirituelles du mouvement moderne au sens que nous lui donnons.

Architecture : naissance de la construction utilitaire, spatiale, basée sur un raisonnement adéquat et respectant le caractère du matériel employé.

Peinture : L’impressionnisme, qui est lui-même antiarchitectural, devient dans l’œuvre de Cézanne le point de départ d’une nouvelle création expressive, faisant abstraction de la réalité directe.

La synthèse des arts commence à se manifester à partir de 1900.

Cette période importante pour la situation actuelle de la synthèse serait représentée dans l’exposition in extenso par des exemples choisis parmi les œuvres des Cubistes, Expressionnistes, Constructivistes, Puristes, Néo-plasticiens et dans l’art concret.

Le texte accompagnant ces illustrations insistera sur le fait qu’aujourd’hui, architecture, peinture et sculpture ont à nouveau des bases spirituelles communes et sont, par conséquent, à même de créer la synthèse, expression des besoins et de la volonté de notre époque.

Quatrième Section : besoins de synthèse aujourd’hui.

La volonté à la synthèse, telle qu’elle se manifeste parmi les architectes et les artistes, n’est que l’expression du besoin général manifesté de toutes parts de créer une unité spirituelle, un centre de la vie sociale, culturelle et politique.

Cette tendance qui s’oppose aux forces propices à la dispersion chaotique a trouvé un reflet dans l’architecture et dans l’urbanisme moderne, elle se manifeste également dans les arts, la science et la philosophie.

Dans cette section, il s’agira donc de prouver, par des exemples accompagnés de textes explicatifs, que les conditions intérieures et extérieures d’une synthèse de l’architecture avec les arts plastiques existent de notre temps. Les lieux où se réalise cette synthèse sont les chantiers privés ou publics et la cité au sens le plus large du terme. (Voir CIAM The Heart of the Town.) Cinquième Section : exemples exécutés.

Cette section comprendra des exemples harmonieux soigneusement choisis de peintures murales, vitraux, sculptures, par rapport au cadre architectural, ainsi que quelques exemples expérimentaux créés ad hoc. La documentation photographie sera choisie parmi les exemples exécutés dans le monde entier.

Les exécutions faites pour l’exposition peuvent être placées soit dans le cadre même de celle-ci, soit dans le parc qui entoure le musée.

Sixième Section : la couleur, élément spatial.

La forme suprême de la synthèse de l’architecture et de la peinture est la mise en couleur spatiale ; son sens tend à compléter l’élément plastique architectural par l’élément de la couleur. Il règne de notre temps une confusion générale à ce sujet parmi les architectes, les peintres, les pouvoirs publics et les clients.

A l’aide d’éléments spatiaux, l’exposition tentera de présenter les possibilités actuelles d’une création architecturale colorée. Dans la même section, la question de la lumière artificielle par rapport à l’architecture sera posée.

Les points suivants ont été retenus pour être également abordés dans l’ensemble de l’exposition : 1. Réalités de la synthèse : conditions pratiques pour la collaboration entre architectes et artistes. Le rôle prédominant de l’architecte.

2. Le rôle des pouvoirs publics, le concours, la commande directe.

3. Education des artistes et des architectes à la synthèse.

4. Procédés techniques nouveaux pour l’architecte, le peintre et le sculpteur.

Le Groupe ESPACE français a proposé de réunir à Zurich pendant la durée de l’exposition un Congrès international sur la synthèse des arts.