Georges Mathieu Georges Mathieu a répondu à notre questionnaire en nous priant de reprendre l’interview qu’il avait accordée à André Parinaud pour «La Galerie des Arts» No 57. Dans cette interview, il exprime l’essentiel de ses conceptions sur l’art et l’architecture.

Georges Mathieu beantwortete unseren Fragebogen. indem er uns bat, das Interview, das er André Parinaud für «La Galérie des Arts» gegeben hatte, aufzunehmen. In diesem Interview drückt er seine wesentliche Auffassung von Kunst und Architektur aus.

Georges Mathieu has replied to our questionnaire by asking us to use the interview that he accorded to André Parinaud for La Galerie des Arts.

No. 57. In this interview he explained the basic ideas underlying his views on art and architecture.

Le rôle de l’artiste est à la mesure de ses ambitions et de ses dons, bien entendu.

Il peut être considérable, puisque c’est lui qui détermine avant tous les autres les nouvelles significations du monde, précédant par l’intuition les démarches du philosophe et du savant. Or, il n’a plus pratiquement aucune mission reconnue dans notre société technologique. Le bourgeois le considère comme un individu en marge. L’Etat l’impose comme un autre citoyen et le condamnera demain à payer des assurances!

Celui donc qui, par vocation naturelle, entretient avec la communauté les liens les plus profonds à la fois dans ses souffrances et ses espoirs, celui qui incarne l’affectivité dans son état le plus pur, n’a aucune place définie dans le monde matérialiste. Un médecin, un ingénieur, un prêtre, un architecte, un ouvrier qualifié est situé avec plus de précision.

Peut-être, au fond, n’est-ce pas plus mal? Dans un monde où toute véritable hiérarchie a disparu, son isolement pourrait bien être la marque de sa grandeur.

Au cours de l’Histoire, ses rapports avec les hommes ont bien changé. Dans les sociétés anciennes, l’art touchait toutes les classes et l’artiste animait toutes les activités. Avec le romantisme et la révolution industrielle, l’art s’est isolé en monde d’exception et l’artiste drapé dans son orgueil, le dos tourné aux autorités, aux savants, aux bourgeois, au peuple, s’est enfermé dans sa tour. Loin de rechercher l’accord avec le public, il a tout fait pour s’en séparer. Sans doute paie-t-il aujourd’hui tant de hauteur, tant de mépris.

Peter Brook ne stigmatise-t-il pas admirablement cçtte situation en affirmant que le théâtre n’a plus aujourd’hui que le choix entre l’articulation d’un «oui» mensonger et une provocation qui fait éclater le public en mille morceaux de «non» vivants?

D’une façon générale, on peut toutefois envisager que l’artiste a aujourd’hui encore un triple rôle : 1. Se consacrer d’abord à la création de formes, à la révélation d’un langage qui coïncide dans ses aspirations profondes et latentes avec la communauté, ou qui au contraire s’affirme violemment contre certaines de ses tendances, ce qui revient au même puisque, en définitive, l’essentiel c’est l’expression d’un drame, le drame de l’être. Et c’est cette volonté de

Die Rolle des Künstlers steht im Verhältnis zu seinem Ehrgeiz und seiner Begabung. Diese Rolle kann beträchtlich sein, da er es ist, der vor allen anderen die neue Bedeutung der Welt aufzeigt, indem er mit seiner Intuition den Bekenntnissen des Philosophen und des Wissenschafters vorangeht. Der Bürger betrachtet ihn als eine Randfigur. Der Staat besteuert ihn wie jeden anderen Mitbürger und wird ihn morgen dazu verurteilen, Versicherungen zu bezahlen.

Er, der aufgrund seiner natürlichen Berufung mit seinem Leiden und seiner Hoffnung die engsten Bande mit dem Gemeinwesen knüpft, er, der die Zuneigung in ihrem reinsten Zustand verkörpert, nimmt keinen bestimmten Platz in der materialistischen Welt ein. Ein Arzt, ein Ingenieur, ein Priester, ein Architekt oder ein Facharbeiter kann mit grösserer Genauigkeit in sie eingeordnet werden.

Vielleicht ist das im Grunde genommen nicht schlechter so. In einer Welt, in der jegliche wahre Hierarchie verschwunden ist, könnte seine Abgeschiedenheit sehr wohl das Zeichen seiner Grösse sein.

Sein Verhältnis zu den Menschen hat sich im Laufe der Geschichte sehr verändert.

In den vergangenen Gesellschaften berührte die Kunst alle Bevölkerungsschichten, und der Künstler belebte alle Tätigkeitsbereiche. Mit der Romantik und der industriellen Revolution hat sich die Kunst in eine Ausnahmewelt zurückgezogen, und der Künstler hat sich, in seinen Stolz gehüllt, den Rücken gegen die Behörden, die Wissenschafter, die Bürger und das Volk gewendet, in seinen Turm eingeschlossen. Weit davon entfernt, die Übereinstimmung mit der Öffentlichkeit zu suchen, hat er im Gegenteil alles getan, um sich von ihr abzusondern. Ohne Zweifel bezahlt er heute den Preis für so viel Überheblichkeit, so viel Verachtung.

Brandmarkt Peter Brook die Situation nicht in wunderbarer Weise, wenn er sagt, dass das Theater heute nur noch die Wahl zwischen der Formung eines verlogenen Ja und einer Provokation, die das Publikum in tausend Stücke eines lebenden Nein ausbrechen lässt, hat?

Allgemein gesehen, kann jedoch heute noch eine dreifache Rolle des Künstlers ins Auge gefasst werden : 1. Er muss sich zunächst der Formgebung widmen, der Enthüllung einer Ausdrucksweise, die in ihrem tiefen und

The role of the artist is of course as great as his ambitions and his gifts. It can be considerable, because after all it is he who first determines the new meanings of the world, preceding by intuition the route of the philosopher or the scholar. Moreover, in our technological society, he has practically no recognized mission. The middle classes regard him as an individual on the edge of society. The State taxes him as any other citizen and tomorrow will force him to pay insurances !

Therefore, he, who by natural vocation maintains the strongest links with the community both by his sufferings and his hopes, he who embodies the emotional state in its purest form, has no defined situation in the materialistic world. A doctor, an engineer, a priest, an architect, a qualified worker is placed with more precision. Basically, is this perhaps not so bad? In a world where all true hierarchy has disappeared, the artist’s isolation could very well be the sign of his worth.

During the course of history his links with men in general have changed greatly. In the old societies art touched all classes and the artist animated all the activities. With the advent of Romanticism and the industrial revolution, art became isolated in a world apart and the artist, wrapped in his pride, turned his back on the authorities, the scholars, the middle classes, the people and shut himself in his tower. Far from seeking the assent of the public, he did everything to separate himself from it. No doubt, today he is paying for being so aloof and showing such contempt.

Peter Brook stigmatizes this situation admirably in asserting that the theatre only has the choice today between the articulation of a deceitful ‘Yes’ and a provocation that will make the public burst into a thousand separate living ‘Noes’.

In a general way, one can always imagine that the artist today has a triple role : 1. To devote himself first of all to the creation of forms, to the revelation of a language which coincides in its deepest and latent aspirations with the community, or which on the contrary asserts itself violently against certain of its tendencies, which comes to the same thing because finally the essential is the expression of a drama, the drama of being. Today, it is this wish to speak which creates the profound link which unites us in our

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dire qui crée le bien profond qui nous unit dans notre revanche contre notre destin. Cet art-là, qui est l’art majeur et qui s’exprime dans la peinture de chevalet, existera toujours avec, il est vrai, une adhésion plus ou moins profonde de la masse, selon que celle-ci aura ou non été préparée.

2. En dehors de l’expression du grand art dans les objets privilégiés que sont donc les tableaux, l’artiste doit avoir pour mission de faire passer son langage dans la vie, sous toutes les formes possibles. C’est le passage du tangage au style qu’il doit, lui aussi, assumer et non pas abandonner à d’autres, comme c’est le cas aujourd’hui avec ce qui s’appelle «l’esthétique industrielle». Son action dans ce domaine est sans limites.

C’est le cadre de la vie quotidienne totale qui est le champ de son action: tout ce qui est susceptible de créer des harmonies plus heureuses entre l’homme et son milieu. C’est l’art de se vêtir, de se loger, de s’alimenter, de se transporter, de mourir même. Les vêtements, la maison les meubles, la décoration, les instruments, les automobiles sont fatalement les plus susceptibles de recevoir l’empreinte de l’artiste, puisqu’il y est question de formes, de couleurs et que c’est lui qui crée les premières et choisit les secondes. Mais au-delà de ces exigences élémentaires, il y a aussi les domaines plus élevés et qui touchent plus immédiatement l’esprit, et où, selon les civilisations, les artistes avaient leur part.

Se divertir, prier, lire entraînaient fatalement l’art des fêtes, l'art religieux, l’art typographique.

La télévision, lé cinématographe, la publicité les ont plus ou moins recouverts, et, ici encore, les artistes semblent avoir cédé la place à d’autres: les réalisateurs, les décorateurs, les artistes graphiques.

3. Enfin, dans une époque de déchéance comme la nôtre, où tout art de vivre a disparu, l’artiste me semble de plus en plus être appelé à jouer un rôle moral L’indépendance exceptionnelle, dont il jouit vis-à-vis des institutions et des hommes, lui crée implicitement des devoirs. Rien, ni personne, évidemment, ne le contraignent à sortir de sa tour d’ivoire.

Mais si l’artiste est doué d’une sensibilité, d’une générosité et d’un désintéressement plus grands que ceux des autres hommes,

latenten Streben mit dem Gemeinwesen übereinstimmt oder die sich im Gegenteil heftig gegen gevyisse ihrer Tendenzen stellt, was eigentlich auf das gleiche herauskommt, da das Wesentliche letztlich der Ausdruck eines Dramas, des Seinsdramas, ist. Dieser Wille zur Aussprache ist es, der das feste Band, das uns in unserer Wiedervergeltung gegenüber dem Schicksal vereinigt, knüpft. Diese Kunst, die eine höhere Kunst ist und in der Staffeleimalerei zum Ausdruck kommt, wird immer mit einer mehr oder weniger tiefen Anhängerschaft von seiten der Masse existieren (das ist wahr), je nachdem diese vorbereitet wurde oder nicht.

2. Neben der Darstellung der grossen Kunst in der Eorm von bevorzugten Objekten, wie Gemälden, muss der Künstler es als seine Aufgabe betrachten, seine Sprache in allen möglichen Formen auf das Leben zu übertragen. Auch den Übergang von der Sprache zum Stil muss er, und er allein, bewerkstelligen. Er darf das nicht anderen überlassen, wie es heute mit der sogenannten «industriellen Ästhetik» der Fall ist. Seine Tätigkeit auf diesem Gebiet hat keine Grenzen. Der Rahmen des ganzen täglichen Lebens bildet sein Tätigkeitsfeld: all das, was dazu beitragen könnte, glücklichere Harmonien zwischen dem Menschen und seinem Milieu zu schaffen. Es ist die Kunst des Sichkleidens, des Wohnens, des Sichernährens, des Fahrens, ja sogar des Sterbens. Kleider, Haus, Möbel, Dekoration, Geräte und Automobile eignen sich auf fatale Weise mehr dazu, ihre Prägung vom Künstler zu erhalten, da es dabei um Formen, Farben geht und er es ist, der die ersteren schafft und die letzteren wählt. Aber neben diesen elementaren Erfordernissen finden sich höhere Gebiete, die sofort den Geist berühren und an denen die Künstler je nach Kultur beteiligt waren. Sich unterhalten, beten und lesen führen selbstverständlich die Kunst der Feste, die religiöse Kunst und die typographische Kunst mit sich.

Fernsehen, Kino und Reklame haben diese Gebiete mehr oder weniger in Beschlag genommen, und auch hier scheinen die Künstler anderen das Feld überlassen zu haben: Regisseuren, Dekorateuren und graphischen Künstlern.

3. In einer Zeit der Entartung wie der unseren, in der jede Lebenskunst verschwunden ist, scheint mir der Künstler schliesslich mehr und mehr dazu berufen

revenge against our destiny. That art which is the major art and which is expressed by easel paintings will always exist, with, it is true, a more or less wholehearted support from the masses, according to whether or not the latter have been prepared to appreciate it.

2. In addition to the expression of major art in pictures, which are privileged objects, the artist takes upon himself the mission of translating his language into life around him, in all possible forms. It is this translation from language to style which he must again assume and must not abandon to another which is what happens today with what is called ‘the industrial aesthetics’. His work in this field is without limits. It is the framework of overall daily life which is his scene of action : all that is capable of creating happier harmonies between man and his surroundings. This includes the art of clothing oneself, of housing oneself, of feeding oneself, of moving about, of dying even. Clothing, housing, furniture, decoration, utensils, cars are irrevocably the most likely to be stamped by the hand of the artist, for there is a question of form and colours; he creates the first and chooses the second. Beyond these elementary needs, there are also the more elevated plains which come nearer to the intellectual sphere and where the artist’s role is governed by the civilization to which he belongs. To amuse oneself, to pray, to write, inevitably brings as consequence the art of the fairs, religious art, typographic art.

Television, the cinema, publicity have more or less masked them and yet even here the artists seem to have ceded their place to others : the creators, the decorators, the graphic artists.

3. Finally, in an era of decline like ours, where all art of living has disappeared, the artist seems to me more and more called upon to play a moral role. The exceptional independence which he enjoys with regard to the institutions and other men implicitly creates duties. Obviously, nothing nor anybody prevents him from coming out of his ivory tower.

However, if the artist is gifted with great sensitivity, with a generosity and a disinterest which is greater than that of other men, he can only suffer more than they when he sees them not only neglecting, but ignoring the ideas of beauty, of quality, of charity.

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il ne peut que souffrir davantage qu’eux de les voir non seulement négliger mais ignorer les notions de beauté, de qualité, de charité.

Il doit rendre utile aux autres les dons qu’il a reçus et les aider s’il le peut à mieux vivre. Il a éminemment alors un rôle social et doit tenter désespérément, s’il le faut, de faire passer le courant spirituel qui a provisoirement quitté le corps de la nation. Non pas du tout en pratiquant un art social, lequel fut toujours au cours des âges mis au service d’une idéologie antérieure, mais en pratiquant mieux que tout autre son devoir d’homme.

Et son premier devoir, aujourd’hui, c’est naturellement sa lutte contre toutes les techniques d’avilissement de l’esprit dont l’ampleur devient chaque jour plus intolérable. Alors que, pendant des dizaines de siècles, le peuple a été tenu à l’écart de toutes les manifestations de l’esprit et que, depuis cent ans, on lui offrait enfin le privilège de jouir des fruits d’une invention créée cinq siècles plut tôt: l’imprimerie, il se trouve tout à coup que, de par l’envahissement des mass media, de par le surgissement de techniques d’information visuelle génératrices de conditionnements insoupçonnés, non seulement on ne lui livre pas les clés de son accession aux sphères plus élevées de la vie, mais on retarde sa prise de conscience d’une vision du monde, en réveillant en lui les forces archaïques, primaires et instinctives, en l’infantilisant, enfin en étouffant le développement des liens affectifs de la communauté dans une massification uniformisante et impersonnelle, où ne régnent plus que des rapports juridiques.

L’artiste, s’il occupe encore le sommet de la hiérarchie sociale de son temps, a aujourd’hui le devoir de dénoncer plus impérieusement qu’un autre toutes les formes d’asservissement de l’être et surtout celles - plus occultes - nées de son désir même de désaliénation. C’est à lui, à lui seul, semble-t-il, qu’appartient désormais de montrer le chemin d’une dignité supérieure. Et cela plus par l’exemple que par le refus. Le refus de toutes les formes d’avilissement, de toutes les formes de sociétés, de toutes les formes de régimes, de toutes les institutions ne servira à rien si, dans un sursaut suprême et dans une volonté collective, nous ne tentons pas une mobi-

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zu sein, eine moralische Rolle zu spielen.

Die aussergewöhnliche Unabhängigkeit, die er gegenüber Einrichtungen und Menschen geniesst, erlegt ihm ausdrücklich Pflichten auf. Nichts und niemand zwingt ihn, seinen Elfenbeinturm zu verlassen.

Ist der Künstler aber mit mehr Einfühlung, mehr Grosszügigkeit und einem grösseren Desinteresse als andere Menschen begabt, so kann er nur um so mehr darunter leiden, wenn er sie den Begriff der Schönheit, der Qualität und der Barmherzigkeit nicht allein vernachlässigen, sondern sogar ignorieren sieht.

Er muss anderen die Beteiligung an den von ihm empfangenen Gaben ermöglichen und, wenn er es vermag, ihnen zu einem besseren Leben verhelfen. Er hat also eine hervorragende soziale Rolle und sollte, wenn es notwendig ist, versuchen, den geistigen Strom, der vorläufig den Körper der Nation verlassen hat, umzulenken. Ganz und gar nicht durch die Ausübung einer sozialen Kunst, die im Laufe der Zeitalter immer in den Dienst einer älteren Ideologie gestellt worden war, sondern indem er besser als alle anderen seine Pflicht als Mensch wahrnimmt.

Und heute besteht natürlich seine erste Pflicht im Kampf gegen alle Techniken der Geistesverdummung, deren Ausmass jeden Tag unerträglicher wird. Jahrhundertelang hat man das Volk abseits von allen Manifestationen des Geistes gehalten, und seit hundert Jahren gibt man ihm endlich das Privileg, die Früchte einer vor fünf Jahrhunderten getätigten Erfindung zu geniessen: der Buchdruckerkunst. Es geschieht plötzlich, dass das Eindringen der Massenmedien, das Auftauchen visueller Informationstechniken, die eine unvermutete Programmierung verursachen, ihm nicht nur nicht den Schlüssel zum Eingang in die höheren Sphären des Lebens gegeben hat, sondern man verzögert seine Bewusstseinsnahme einer Weitsicht, indem man archaische, primäre und instinktive Kräfte in ihm weckt, indem man ihn verniedlicht und schliesslich die Entwicklung von affektiven Banden innerhalb der Gemeinschaft durch eine gleichmachende und unpersönliche Vermassung, wobei einzig juristische Beziehungen gelten, erstickt.

Der Künstler hat, sollte er noch den Gipfel der Sozialpyramide seiner Zeit einnehmen, heute mehr als jeder andere

He must make useful to others the gifts which he has received and help them, if he can, to live better. To a large extent he has a social role and he must try desperately if necessary to arouse a resurgence of interest in spiritual matters, for—at the moment—this is one aspect of life which the body of the nation has temporarily forgotten. This should not be done by practising a social art, which has throughout the ages always been put to the service of a previous ideology, but in practising better than anybody else his duty as a man.

Today his first duty is naturally his battle against all the techniques that degrade the mind and whose scope becomes more intolerable every day. While during the centuries the people were denied the right to all the intellectual manifestations, for the last hundred years they have the chance of enjoying the fruits of an invention that was created five centuries earlier: the printing press. It has happened suddenly with the invasion of the mass media, and by the sudden upgrowth of visual information techniques, which are generators of hidden conditioning, not only does one not hand man the keys of his accession to the higher spheres of life but one hinders his becoming aware of a vision of the world by awakening in him the primary and instinctive archaic forces, by rendering him childlike and finally in stifling the development of the effective links of the community in a uniform and impersonal massing where only the juridical links have sway.

The artist, if he still occupies the peak of the social hierarchy of his time, has today the duty to denounce more imperiously than anybody else all the forms of enslavement of the individual and above all those—more hidden—born of his own desire for reintegration. It seems that it is for the artist, and him alone, to show henceforth the road towards a higher dignity and this more by example than by contempt. The refusal of all forms of debasement, of all forms of society, of all forms of regimes, of all the institutions, will serve no purpose, if in one giant leap forward with a united will we do not attempt a mobilization of all the generous forces which remain in us, to infuse into everyone of our daily gests a little warmth, a little love, a little soul. What we need, is not a revolution, it is a rebirth and not only an artistic rebirth in the Italian man-

lisation de toutes les forces généreuses qui demeurent en nous, pour insuffler dans chacun de nos gestes quotidiens un peu de chaleur, un peu d’amour, un peu d’âme.

Ce dont nous avons besoin, ce n’est pas d’une révolution, c’est d’une renaissance. Et pas seulement d’une renaissance artistique à l’italienne, mais d’une renaissance spirituelle. Elle est possible.

C’est une tâche fascinante et d’autant plus fascinante qu’elle est réalisable aujourd’hui, grâce, paradoxalement aux moyens extraordinaires dont nous disposons, à ces techniques mêmes de diffusion de la pensée et de l’image, à ces mass media dont personne aujourd’hui n’oriente l’action.

A quoi sert à notre «civilisation» d’être l’héritière de toutes les autres; à quoi sert la conscience de notre déchéance, si nous laissons s’installer en nous la gangrène, si nous abandonnons le peuple aux appétits de ceux qui, sans foi et sans scrupule, ne pensent qu’à leurs intérêts et non pas au sien ou même - ce qui est aussi grave - si, dans une apathie tout aussi méprisable, nous laissons entraîner nos frères inconscients dans ce maelstrom où les apprentis sorciers continuent, sans aucune sanction, d’accomplir des gestes meurtriers, puisque aucun code ne prévoit de châtiments pour les

die Pflicht, alle Formen der Versklavung des Seins und besonders diejenigen, die seinem - mehr verborgenen - Wunsch nach Nichtverfremdung entspringen, mit Nachdruck zu bekämpfen. Ihm, und ihm allein, scheint es, ist es aufgetragen, in Zukunft den Weg zu einer höheren Würde zu weisen. Und dies mehr durch ein gutes Beispiel als durch Ablehnung.

Die Ablehnung aller Formen der Erniedrigung, aller Gesellschaftsformen, aller Herrschaftsformen und aller Einrichtungen wird nichts nützen, wenn wir nicht in einer äussersten Anstrengung und mit einem kollektiven Willen versuchen, alle grosszügigen Kräfte, die in uns wohnen, zu mobilisieren, um jeder einzelnen unserer täglichen Gesten ein wenig Wärme, ein wenig Liebe und ein wenig Seele einzuhauchen.

Was wir brauchen, ist nicht eine Revolution, sondern eine Wiedergeburt. Und nicht nur eine künstlerische Wiedergeburt italienischer Art, sondern eine geistige Wiedergeburt. Sie ist möglich. Das ist eine faszinierende Aufgabe, und sie ist um so faszinierender, als sie heute durchführbar ist, paradoxerweise dank den aussergewöhnlichen Mitteln, über die wir verfügen, dank den Techniken der Gedanken- und Bildverbreitung und dank den Massenmedien, deren Handeln heute von niemandem gesteuert wird.

ner, but a spiritual rebirth. It is possible.

It is a fascinating task and all the more fascinating because it is realizable today, thanks paradoxically to the extraordinary means of which we dispose, thanks even to those techniques of distribution, of thought and of image, to the mass media of which nobody at present guides the action. What benefit is it to our ‘civilization’ to be the inheritor of all the others, how does being aware of our decline help, if we allow the gangrene to take hold in us, if we abandon the people to the appetites of those who, without religion and without scruples, think only of their interests and not of those of their fellows, or even—what is also serious—if, in an apathy which is quite as despicable, we allow our unconscious brothers to be led into this maelstrom where the sorcerers’ apprentices continue, without any sanction, to fulfil murdering gests, because no code prescribes punishment for wounds and blows dealt to the mind. With impunity that television programme, that film, that magazine kill every day not only that which remains of true humanity in the adults but snuffs out the generous instincts of those who are starting out in life. There is total licence, and nobody dares either to condemn, to criticize or to forbid. Is it not forbidden to prohibit?

Who dares to ring the alarm bell? Who

Georges Mathieu.

Maquette d’une résille pour la façade d’un immeuble. 1969.

Modell einer Hausfassade, 1969.

Model of lattice-work for the facade of a building.

1969.

.il

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blessures et les coups portés aux âmes.

Impunément, tel programme de télévision, tel film, tel magazine tue chaque jour non seulement ce qui reste de véritable humanité chez les adultes, mais étouffe les instincts généreux de ceux qui s’ouvrent à la vie. La licence est totale, et personne n’ose plus ni condamner, ni censurer,^ii interdire. N’est-il pas interdit d’interdire? Qui osera tirer la sonnette d’alarme? Mais qui même songe à la tirer? La sauvegarde de l’esprit, par un paradoxe inouï mais peut-être assez révélateur, de l’état galopant de notre déchéance, la sauvegarde de l’esprit, dis-je, n’a fait l’objet d’aucun souci, ni de la part de nos réformistes1.

Il est grand temps de considérer que, avant tous les hommes, nous avons, nous artistes, touché le fond du néant de la liberté. En face de ce néant moderne, où la liberté est considérée comme fondement - ou comme capacité, pour l’être humain, d’être son propre fondement - nous avons le prodigieux privilège de pouvoir enfin, et pour la première fois depuis des dizaines de siècles, utiliser cette liberté si périlleusement gagnée, non plus pour détruire, mais pour construire. Et c’est à nous encore de faire les premières propositions de ce monde nouveau.

G. M.

Was nützt es unserer «Kultur», Erbin aller anderen Kulturen zu sein, was hilft uns das Bewusstsein unserer Entartung, wenn wir uns vom Krebs befallen.lassen, wenn wir das Volk der Begierde jener überlassen, die treulos und bedenkenlos nur an ihre eigenen Interessen und nicht an die seinigen denken, oder - was auch sehr schwerwiegend ist - wenn wir, aus gleichermassen verachtenswerter Apathie, Zusehen, wie unsere bewusstlosen Brüder mitgerissen werden in jenen Abgrund, wo die Hexengesellen straflos fortfahren, verbrecherische Taten zu vollbringen, denn kein Gesetzbuch sieht Strafen für Verletzungen und Anschläge auf menschliche Seelen vor! Ungestraft tötet jenes Fernsehprogramm, jener Film, jenes Magazin tagtäglich nicht nur, was an wirklicher Menschlichkeit bei den Erwachsenen übriggeblieben ist, sondern erstickt auch die grossherzigen Instinkte jener, die sich dem Leben gegenüber öffnen. Die Zügellosigkeit ist vollkommen, und niemand wagt es mehr, zu verdammen, zu zensurieren oder zu verbieten. Ist ein Verbot nicht gestattet? Wer wird es wagen, die Alarmglocke zu ziehen? Aber wer denkt nur daran, sie zu ziehen? Die Erhaltung des Geistes war durch ein unerhörtes, aber für den Zustand unserer Entartung vielleicht sehr aufschlussreiches Paradox nie Gegenstand irgendeiner Besorgnis, auch nicht von seiten unserer Reformer1.

Es ist höchste Zeit zu sehen, dass wir Künstler vor allen anderen Menschen den Grund der Nichtigkeit der Freiheit berührt haben. Angesichts dieses modernen Nichts, wo die Freiheit als Fundament betrachtet wird - oder der Fähigkeit des menschlichen Wesens, seine eigene Grundlage zu bilden -, haben wir das wunderbare Privileg, diese unter so grossen Gefahren gewonnene Freiheit endlich und zum erstenmal seit Jahrhunderten nicht mehr zur Zerstörung, sondern zum Aufbau verwenden zu können. Und es liegt noch an uns, die ersten Vorschläge für diese neue Welt zu machen.

G. M.

1 II est piquant de constater que la révolte des étudiants aura eu pour conséquence entre autres choses - la diminution du budget des Affaires culturelles. La hausse du niveau de vie ne peut-elle dans ce monde qu’entraîner une baisse du niveau de l'esprit?

1 Es hat seinen Reiz, festzustellen, dass die Studentenrevolte - unter anderem - die Verringerung des Budgets des Kulturministeriums zur Folge gehabt haben wird.

Kann die Verbesserung des Lebensstandards in dieser Welt nur eine Herabsetzung des Geistesstandards mit sich führen ?

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even thinks of doing so? By an incredible paradox, the safeguard of the mind, but this is perhaps also a revealing factor of our gallop into decline, the safekeeping of the spirit, I said, has been the object of no concern, not even on the part of our reformists1. It is high time to consider that more than other men we artists have touched the deep emptiness of liberty. In the face of this modern emptiness, where liberty is considered as basic—or as a capacity by which the human being will be his own foundation ! we have the tremendous privilege of being able finally and for the first time for ten centuries to use this liberty so perilously won, not for destroying but for building. It is up to us to make the first propositions for this new world.

1 It is pungent to note that the revolt of the students has had as consequence—among other things—a decrease in the budget for cultural affairs. The rise in the living cost, can it only bring in this world a corresponding lowering of the intellectual level?